L'édito de Adèle Morerod - Le cinéma, magnifique voyage ?

Le 29 mai 2019

Pour qui aime à disparaître dans l’obscurité d’une salle de cinéma ou à plonger dans son écran pour suivre un film, il y a l’attente d’être emporté ailleurs. L’idée du voyage s’incarne parfois très concrètement, comme en témoigne Un tramway à Jérusalem, le dernier film d’Amos Gitaï, qui, par les déambulations du véhicule à travers les rues, réunit dans un idéal de paix et de partage les histoires individuelles des passagers. S’il est aussi question de transport dans Les Crevettes pailletées, le trajet effectué par cette équipe de water-polo est autant une course vers le championnat que l’occasion d’éclairer avec sensibilité et humour les réalités diverses d’une équipe homosexuelle et les difficultés qu’elle rencontre.

Toutefois, cette exploration des différences se fait parfois plus sombre et adopte des moyens moins concrets pour nous emporter hors des frontières connues. Ainsi, tant Pity que Le Coureur nous plongent, via leurs cadrages respectivement géométriques et figés ou animés par le mouvement de la course, dans le quotidien de deux personnages ambigus. Dès lors, la caméra devient véritablement véhicule et nous invite à côtoyer brièvement des intériorités dérangeantes mais pourtant bien réelles, même si l’on préfère souvent ne pas les voir.

Parfois aussi, le voyage échoue simplement et l’on se retrouve bien loin de l’exotisme promis ou des souvenirs radieux retrouvés, comme dans Curry Western ou Pokémon : Détective Pikachu, qui laissent leur spectateur en rade. On peut alors toujours se tourner vers le (ré)confort de classiques comme les films des frères Taviani (voir sortie DVD, pp. 20-21), un choix peut-être plus sûr, mais qui n’exclut pas pour autant les déplacements aussi bien historiques, géographiques que moraux.