Coureur

Affiche Coureur
Réalisé par Kenneth Mercken
Titre original Coureur
Pays de production Belgique
Année 2018
Durée
Genre Drame
Distributeur Filmcoopi
Acteurs Niels Willaerts, Fortunato Cerlino, Karlijn Sileghem, Nicola Rignanese, Koen De Graeve, Gunther Lesage
Age légal 14 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 812

Critique

Loin d’un énième biopic sur le parcours épineux d’un sportif d’élite, l’histoire de Jonas Widmer (Max Hubacher), coureur suisse de haut niveau, a dans Le Coureur un propos et une portée bien plus vastes que les sprints impressionnants du personnage (pour lesquels il faut au tournant féliciter Hubacher, dont l’entraînement physique est époustouflant).

Le film emporte le spectateur dans une compilation de vols, d’agressions, d’entraînements effrénés et de relations malsaines (voire d’inceste?) qui aurait pu faire du récit un drame plombant qui vous reste en travers de la gorge. Or, Hannes Baumgartner prend le parti inverse en créant par sa mise en scène un doux mélange d’affection et d’antipathie pour l’agresseur (soit Jonas), qui garde ainsi non seulement son humanité mais surtout l’intérêt de l’audience. Le tour de force du réalisateur réside dans sa capacité à tenir en haleine le public appelé à se questionner sur la signification des gestes du coureur. En effet, celui-ci vole et fétichise les sacs des femmes, fait preuve d’un tel refoulement qu’il ment à tout le monde y compris à lui-même, et finit par agresser d’innocentes victimes qui font les frais de son mal-être. C’est ce vécu du personnage, plus que le fait divers - les agressions nocturnes et secrètes de femmes de la part de Widmer, tandis qu’il est paradoxalement vénéré pour ses exploits sportifs - sur lequel le film met l’accent.

Alors que tout pourrait repousser le spectateur (tout particulièrement la spectatrice), l’intrigue, par ces actes inconcevables offerts à l’audience comme les pièces d’un puzzle à reconstituer, suffit à captiver. L’admirable travail effectué sur la prise de vue des diverses courses par le chef opérateur (Gaëtan Varone) - aussi bien par une caméra à l’épaule que par travellings plus fluides - n’est en outre pas sans lien avec la possible identification déroutante au personnage. Loin de la grande tragédie qui fait jouer du violon afin d’émouvoir le spectateur, Baumgartner sait maintenir une sobriété bienvenue par une absence à la fois d’effets visuels et de musique, chose rare dans le cinéma fictionnel contemporain.

Malheureusement, certaines longueurs tirent le récit vers le bas, et bien que laisser en suspens des interrogations soit toujours appréciable - surtout pour un premier film - ne répondre ici à aucune d’entre elles atténue la richesse de l’histoire et finit par agacer. Somme toute, le film comme son héros aurait encore du chemin à faire pour décrocher l’or olympique. Toutefois, l’ensemble file déjà largement dans la bonne direction.


Anthony Bekirov

Appréciations

Nom Notes
Anthony Bekirov 15