Critique
En 1995, LA HAINE avait attiré le jury de Cannes (Prix de la mise en scène) vers un jeune réalisateur français qui signait là son deuxième long métrage. C'était Mathieu Kassovitz.
Sorti en 1997, ASSASSIN(S) a déçu. Voici LES RIVIERES POURPRES dont on a envie de dire qu'il n'est ni bon, ni mauvais, bien au contraire. Mathieu Kassovitz est un excellent comédien. Il l'a prouvé avec des rôle difficiles dans REGARDE LES HOMMES TOMBER ou UN HEROS TRES DISCRET, tous les deux de Jacques Audiard. Ce qui semble lui poser problème, quand il passe de l'autre côté de la caméra, c'est l'histoire, celle de son avant-dernier film était particulièrement tirée par les cheveux. Cette fois-ci, Mathieu Kassovitz s'inspire d'un roman de Jean-Christophe Grangé, il l'adapte pour son scénario en collaboration avec l'auteur. Qu'en penser?
Le récit met en parallèle deux enquêtes qui finissent par se rejoindre. Un étudiant est mort après avoir subi plusieurs heures de tortures. Pierre Niémans (Jean Reno), chargé du dossier, enquêteur réputé dans toute la police française, nourrit une peur panique pour les chiens. A quelque trois cents kilomètres de là, la tombe d'une fillette de douze ans, morte une vingtaine d'années plus tôt a été profanée. Dans les archives de l'école qu'elle a fréquentée, le policier Max Kerkérian (Vincent Cassel), ancien voleur de voiture converti en policier par goût de la nuit et du danger, découvre que tout ce qui concerne la fillette a disparu. Les deux hommes se retrouvent bientôt côte à côte, pris dans un macabre jeu de pistes, dont les indices sont de nouveaux cadavres. Derrière tout ça se cachent des croyances on ne peut plus malsaines, dont les Nazis avaient faits leur acte de foi. Et la fin de l'histoire, rocambolesque et peu crédible, gâche en bonne partie un scénario déjà indigeste parce que trop superficiel.
Cette superficialité rapproche Mathieu Kassovitz du cinéma industriel hollywoodien, c'est dommage. Les partis pris musicaux, le choix des éclairages, quand ce ne sont pas les ténèbres, pour les moments les plus cruciaux, sont des effets connus en particulier des grands studios californiens qui en abusent. On peut regretter, même s'il le fait bien, que Mathieu Kassovitz adopte ces procédés, comme si, à l'instar de son confrère Luc Besson, il était incapable de résister aux sirènes. Toutefois, LES RIVIERES POURPRES ne sont pas à jeter. Les qualités du film sont bien présentes dans le travail de la caméra, dans la composition des plans, dans la beauté des images. Et aussi dans l'observation des caractères, en particulier le tempérament sympathique des deux enquêteurs. On souhaite donc à Mathieu Kassovitz de trouver de bons scénaristes, d'apprendre à approfondir ces sujets, et surtout, de rester français.
Geneviève Praplan