No et moi

Affiche No et moi
Réalisé par Zabou Breitman
Pays de production France
Année 2009
Durée
Genre Drame
Distributeur jmhdistributions
Acteurs Julie-Marie Parmentier, Zabou Breitman, Bernard Campan, Nina Rodriguez, Antonin Chalon
Age légal 12 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 625
Bande annonce (Allociné)

Critique

Le film est tiré du roman éponyme de Delphine de Vigan. L’adaptation est parfaitement réussie - même si Zabou Breitman recourt, ici ou là, à un commentaire «off» manifestement repris du livre, ou encore à quelques fioritures stylistiques superflues.

Lou Bertignac (Nina Rodriguez) est une enfant précoce: à 14 ans elle est déjà en classe de deuxième d’un lycée parisien, avec deux ans d’avance. Elève brillante mais solitaire, fille unique un peu délaissée par une mère (Zabou Breitman) devenue dépressive après la mort d’un bébé, en bisbille parfois avec un père (Bernard Campan) qui l’aime, mais ne sait pas toujours s’y prendre, Lou n’a guère qu’un copain, Lucas (Antonin Chalon), une tronche un peu bagarreuse qui accumule insolences et renvois de l’école…

Lou doit faire un exposé et elle choisit de parler d’une jeune SDF qu’elle a croisée plusieurs fois à la gare d’Austerlitz. Une fille de 19 ans qui se prénomme Nora - on lui dit No - (Julie-Marie Parmentier), une vagabonde qui fait la manche, demande des clopes, traîne dans la gare et s’endort au café lorsque la lycéenne cherche à l’interviewer. Lou va découvrir un personnage imprévisible, marqué par ses passages en institutions, instable, qui disparaît puis refait surface, souvent à bout de forces. Elle convaincra ses parents de l’héberger à la maison. Mais malgré leur aide et celle apportée par Lucas - qui occupe l’appartement vide de ses parents séparés et absents -, l’entreprise se révélera pleine d’embûches.

Avec ses films (Se souvenir de belles choses, L’homme de sa vie, Je l'aimais) l’actrice-réalisatrice Zabou Breitman occupe une place particulière dans le cinéma français, se frayant un chemin très personnel dans le monde du 7e art hexagonal, loin des comédies légères ou des gaudrioles à la mode. Sa façon à elle de faire du cinéma c’est de parler avec subtilité des gens qui l’entourent, de porter sur eux un regard attentif, pointu mais bienveillant. Excellente comédienne - et excellente directrice d’acteurs -, elle accomplit, avec No et moi, de véritables petits miracles au niveau de l’interprétation, avec deux jeunes actrices absolument stupéfiantes de naturel, tout particulièrement Julie-Marie Parmentier dans le rôle difficile et «borderline» de No. Il y a là quelques séquences que l’on dirait tout droit sorties d’un documentaire (la réalisatrice a d’ailleurs toujours avoué sa passion pour ce genre de films).

A travers le triple portrait de Lou, No et Lucas, c’est l’histoire de plusieurs solitudes que Zabou Breitman met en images. Tous les personnages du film semblent appartenir, de près ou de loin, à la majorité silencieuse des gens dont on ne parle guère. Des isolés que la cinéaste tire de l’oubli, soutient discrètement, éclairant ainsi un coin sombre de notre société.

Il n’y a pas de concession à l’actualité dans le film de Zabou Breitman (le monde des SDF, de la marginalité, de la précarité et de l’exclusion n’est qu’une toile de fond). Il n’y a pas à proprement parler de critique sociale ni d’appel à la culpabilité, pas plus que de discours politique: No et moi décrit une tranche de vie, celle d’une adolescente qui se met en tête, avec un peu de naïveté et d’idéalisme, de sortir No de son pétrin, de l’aider à se réinsérer dans la vie active, via les services sociaux, avec l’aide aussi de ses parents et de son copain Lucas. Une opération de sauvetage hélas trop lourde pour tout le monde.

No et moi, bien maîtrisé dans sa forme (classique) et dans son rythme, est une œuvre âpre et tendre à la fois, aux personnages attachants et crédibles, comme le sont aussi toutes les situations décrites. Reste évidemment une conclusion un peu amère, comme le dit un protagoniste: «Peut-être que dans la vie on a une seule chance, et si on ne sait pas la saisir, tant pis, ça ne revient pas.»

Antoine Rochat

Appréciations

Nom Notes
Antoine Rochat 14
Georges Blanc 16
Daniel Grivel 14
Geneviève Praplan 15
Anne-Béatrice Schwab 14