About Kim Sohee

Affiche About Kim Sohee
Réalisé par July Jung
Titre original About Kim Sohee
Pays de production Corée du Sud
Année 2022
Durée
Musique Jang Young-gyu
Genre Thriller policier
Distributeur trigon-film
Acteurs Choi Hee-jin, Doona Bae, Kim Si-eun
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 909

Critique

La réalisatrice July Jung avait défrayé la chronique en 2014 avec A Girl At My Door, un des premiers films coréens à montrer une relation lesbienne. Avec About Kim Sohee, la cinéaste donne un autre grand coup de pied dans la fourmilière qu’est la société de Corée du Sud.

Kim Sohee (Kim Si-eun) est une lycéenne passionnée de K-pop. Son rêve? Devenir danseuse dans un groupe, un jour, peut-être. Le soir après ses cours, elle s’entraîne sans relâche. Mais son rêve s’apprête à s’échouer contre l’écueil qu’est le stage de troisième année de lycée. Obligatoire, ce stage remplace les cours, et envoie les étudiants au casse-pipe, dans des sociétés souvent peu scrupuleuses.

Sohee se retrouve dans une boîte de télécom, où elle doit vendre des abonnements, mais surtout empêcher les clients de résilier leur contrat, quitte à employer des méthodes de persuasion peu éthiques. Révoltée par le harcèlement qu’elle subit en tant que jeune femme, révoltée par l’ambiance délétère dans son bureau, et révoltée par les agissements peu scrupuleux de ses collègues, Sohee fait tête à ses supérieurs. Mais dans cette société (au sens micro et macroscopique), la révolte a un prix très lourd.

En parallèle, la détective Oh Yoo-jin (Doona Bae, déjà remarquée dans le premier long métrage de July Jung A Girl At My Door) enquête sur les étranges suicides de lycéennes. Petit à petit, elle va dévoiler un réseau de favoritisme entre les compagnies qui profitent de la main-d’œuvre bon marché que représentent les étudiants, et les écoles qui y envoient leurs élèves pour booster leur réputation.

July Jung aime les sujets qui fâchent. Son premier film en 2014, A Girl At My Door, abordait sans détour les abus physiques et sexuels sur enfants, ainsi que les relations amoureuses entre femmes, encore mal vues aujourd’hui en Corée du Sud. Dans About Kim Sohee, elle a mené pendant des années une enquête documentaire sur le système de «prêt» d’étudiants entre les sociétés et les écoles. Ce film est d’ailleurs inspiré d’un fait divers réel, qui n’avait jamais été résolu: le suicide d’une étudiante en stage.

Ce n’est pas ici que vous trouverez l’espoir. C’est un film funéraire, où les hommes sont faillibles et les rêves oblitérés. Les chefs d’entreprise y sont mesquins, vils, prêts à l’humiliation la plus basse pour faire augmenter ne serait-ce que d’un iota leur chiffre d’affaires du mois. La vie humaine se marchande, c’est un bien d’échange comme un autre. Et pour mieux souligner la violence inhumaine de ce système, July Jung a opté pour une mise en scène dont l’audace se fait rare aujourd’hui. Une audace dont le coup de théâtre qui survient au milieu du film ne trouve des équivalents que dans Hitchcock et Antonioni (ceux qui verront le film comprendront).

Et malgré tout, parmi toute cette noirceur, July Jung prend le temps de nous montrer qu’elle aime ses personnages. Le thriller policier devient drame humain, devient histoire(s) de femmes, et crucifie une situation dont il ne ressort aucun gagnant. L’intelligence de cette histoire est de bien nous montrer que si la violence est inhumaine, c’est parce qu’elle n’a ni visage ni nom. Même ces chefs d’entreprise véreux subissent la pression de cette main

invisible, ensemble de structures sociales mises en place depuis trop longtemps pour être questionnées, et trop ancrées pour être autre chose que des réflexes. Il n’y a ni bon ni méchant chez July Jung, uniquement des humains qui souffrent en silence, et qui attendent en vain que quelqu’un les écoute.

Anthony Bekirov

Appréciations

Nom Notes
Anthony Bekirov 15