La Nuit du 12

Affiche La Nuit du 12
Réalisé par Dominik Moll
Titre original La Nuit du 12
Pays de production France, Belgique
Année 2022
Durée
Musique Olivier Marguerit
Genre Thriller, Policier
Distributeur Ascot Elite
Acteurs Bouli Lanners, Bastien Bouillon, Thibaut Evrard, Julien Frison, Théo Cholbi, Johann Dionnet
Age légal 14 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 881

Critique

Fiction inspirée de faits réels, La Nuit du 12 a été présentée dans la section Cannes Première de la 75e édition du festival. Esthétiquement sobre mais émotionnellement chargé, le film propose une vision réaliste et féministe d’une affaire non résolue.

Alors qu’elle rentre d’une soirée entre copines organisée chez sa meilleure amie, une jeune femme du nom de Clara se fait assassiner, brûlée vive. La police judiciaire est mandatée pour résoudre l’affaire. Seulement, cela se révèle plus difficile que prévu, et le chef de la brigade criminelle restera hanté par ce mystère.

Le carton introductif du film affiche clairement la couleur en nous annonçant que l’investigation sur le meurtre que nous allons voir fait partie des 20% qui ne sont jamais résolues par la police judiciaire. Cela met le spectateur dans un étrange suspense: l’affaire restera-t-elle vraiment irrésolue à la fin du film? Aussi, La Nuit du 12 fait penser à Twin Peaks et à Fire Walk With Me et notamment par son décor de bourgade nichée au creux des montagnes et par le personnage de Clara, qui rappelle Laura Palmer. Mais contrairement à Lynch, Dominik Moll renonce à toute fioriture esthétique pour se concentrer sur son intrigue et les individus qui l’habitent, pour mieux faire ressortir sa noirceur intrinsèque.

La trame narrative étant somme toute assez banale, la réussite du film réside ailleurs. Les personnages et la représentation de l’unité de police, d’abord. Le métier de policier n’est pas glamourisé, on voit la dure réalité des heures supplémentaires, au détriment de la vie privée, passées à rédiger des PV et non à combattre héroïquement le crime. De son côté, Yohan, le chef du groupe de la brigade criminelle, est loin des clichés machistes du genre. À l’écoute de ses collègues et chagriné par les conditions déplorables auxquelles ils doivent faire face, on le voit souvent rouler fiévreusement dans le vélodrome de Grenoble, comme si, en l’imitant, il pouvait briser la dynamique de l’enquête, qui tourne elle aussi en rond. La réalisation propose par ailleurs des contrastes de tonalité assez déroutants, intercalant des séquences de rigolade entre policiers dans le récit de plus en plus morose de l’enquête. L’œuvre s’ouvre sur une telle dichotomie, faisant succéder à un pot de départ un peu grivois une scène de meurtre sur fond d’opéra où l’on voit une jeune femme en feu courir au ralenti.

Outre ces quelques incartades comiques, l’atmosphère générale se dégageant du film est celle d’une immense tristesse et injustice, surtout si l’on prend en compte son discours féministe. En effet, la jeune femme assassinée est décrite comme tombant facilement amoureuse et aimant plaire aux hommes qu’il vaudrait mieux éviter. Cette caractéristique devient alors sujet à débats crasseux, entre ceux qui estiment qu’«elle l’avait bien cherché» et les autres moins cyniques. Cette vision, liée au piétinement de l’investigation, nous fait nous demander, avec le personnage de Yohan, si la coupable de l’assassinat de Clara ne serait autre que la misogynie elle-même, et non un homme en particulier. Une œuvre qui ne respire pas la joie de vivre donc, mais dont l’effet coup de poing subtil se révèle malheureusement encore et toujours nécessaire.

Amandine Gachnang

Appréciations

Nom Notes
Amandine Gachnang 16