Maps To The Stars

Affiche Maps To The Stars
Réalisé par David Cronenberg
Pays de production Canada, U.S.A., France, Allemagne
Année 2014
Durée
Musique Howard Shore
Genre Drame
Distributeur pathefilms
Acteurs Julianne Moore, John Cusack, Olivia Williams, Mia Wasikowska, Sarah Gadon
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 703
Bande annonce (Allociné)

Critique

A Hollywood, une famille vit immergée dans le monde du cinéma : il y a Benjie (Evan Bird), 13 ans et déjà star TV (à 300'000 dollars la semaine); son père Stafford Weiss (John Cusack), auteur à succès, spécialiste de l’autogestion et «psychothérapeute» de plusieurs vedettes; sa mère Cristina (Olivia Williams) qui soutient la carrière de son fils, et sa sœur Agatha (Mia Wasikowska), récemment libérée (elle s’adonnait à la pyromanie). Il y a encore et surtout Havana Segrand (Julianne Moore), une star que Stafford s’efforce de soutenir dans sa carrière d’actrice et dans sa vie de femme, une vedette qui rêve de tourner un remake du film qui a fait de sa mère Clarice (Sara Gadon) une star des années 60. Une mère dont le fantôme continue à hanter les nuits de sa fille. Havana est sans doute le personnage pivot du film, le plus déconcertant dans sa recherche d’immortalité et sa totale absence d’empathie.

Maps To The Stars se présente d’abord comme une satire du milieu hollywoodien. Un monde artificiel d’acteurs perturbés, les uns à peine sortis de l’adolescence, les autres phagocytés par le système, vedettes narcissiques et victimes de leur obsession permanente de la célébrité. Un lieu où la névrose le dispute au vice, et la jalousie à la trahison. Mais à côté de ce premier niveau de lecture, il y en a un second: le film peut se définir comme le tableau tragique d’une famille marquée par l’inceste. Stafford et Cristina forment en effet un couple incestueux (ils sont frère et sœur), ce qui explique sans doute les dérives (actuelles et futures) de leurs deux enfants. On n’en dira pas plus.

Le lien entre cette satire d’Hollywood et l’inceste familial ? En forçant un peu le trait on dira que la Mecque américaine du cinéma et du business vit en vase clos et que sa survivance ressemble fort à une dynamique incestueuse… Hollywood, une cité dépravée promettant la gloire sur l’écran, mais une cité en perdition? Le cinéaste le laisse entendre. Les lignes de force du film apparaissent peu à peu.

Cronenberg joue d’abord sur le registre du réalisme et de la satire: le tableau est alors très cruel, l’univers éprouvant et malsain. A preuve le jeune Benjie, petit roi prétentieux et détestable, conscient de sa très grande valeur commerciale, irresponsable dans son comportement et déjà drogué. Puis le cinéaste fait des incursions fréquentes dans le monde du fantastique: plusieurs personnages sont happés par un univers parallèle fait de souvenirs cauchemardesques (fantômes de la mémoire, vrais ou faux?) et de fantasmes (qui relèvent parfois de l’horreur). La famille Weiss éclatera sous les effets conjugués des lois de l’industrie hollywoodienne et du dysfonctionnement psychique de chacun.

S’appuyant sur une mise en scène rigoureuse, Cronenberg porte un regard critique – parfois féroce - sur les différents mondes qui l’entourent (y compris notre monde occidental en général), et son film n’est guère porteur d’espoir. Les acteurs – la performance de Julianne Moore (Havana), dans son rôle de vedette perturbée, est remarquable – incarnent parfaitement leurs personnages, tous plus ou moins liés au monde du cinéma (on pourra se demander si Stafford, le père, n’est pas, à sa manière, une sorte de metteur en scène manipulant ses acteurs - ici ses patients et sa famille - et ne supportant aucune contradiction).

L’intérêt de ce film, souvent déconcertant, se situe dans ces jeux de miroirs entre le monde du cinéma et celui de la vie familiale, entre une réalité grinçante et un monde fantasmé et déglingué, entre les contraintes menaçant chaque existence et le besoin d’évasion de chacun. D’où les références constantes, tout au long du film, à Paul Eluard et son poème Liberté. Une liberté insaisissable…

Antoine Rochat

Appréciations

Nom Notes
Antoine Rochat 13
Daniel Grivel 11
Nadia Roch 10
Georges Blanc 10