Armée du crime (L')

Affiche Armée du crime (L')
Réalisé par Robert Guédiguian
Pays de production France
Année 2009
Durée
Musique Alexandre Desplat
Genre Historique, Drame, Guerre
Distributeur frenetic
Acteurs Virginie Ledoyen, Robinson Stévenin, Simon Abkarian, Grégoire Leprince-Ringuet, Lola Naymark
Age légal 14 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 599
Bande annonce (Allociné)

Critique

Beau film que cette nouvelle œuvre de l’Arménien, dévouée à la mémoire d’un de ses compatriotes, héros de la Résistance française.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, la Résistance française a bénéficié du solide renfort des immigrés. Juifs communistes. Arméniens, Hongrois, Roumains, Polonais, Italiens, Espagnols ont lutté pour la même cause: l’Internationale rouge devait triompher du fascisme. «Ils demeurent un exemple dans notre monde actuel d’inégalités criantes, de replis communautaires et religieux», affirme Robert Guédiguian. Parmi ces combattants de l’ombre, Missak Manouchian fait figure de héros. Ce sont ses dernières années que raconte le réalisateur, arménien comme son personnage, avec l’arrière-pensée de remettre en lumière l’action d’un parti aujourd’hui déliquescent.

Tout juste libéré d’un camp, Missak (Simon Abkarian) accepte de former et de diriger un groupe de jeunes juifs d’origines diverses, révoltés par l’occupation allemande et désireux de voir triompher la liberté dans le pays des Droits de l’homme. Entrés dans la clandestinité, ils multiplient les attentats contre les nazis et les collaborateurs, au mépris des rafles et de la surveillance policière qui se resserre de plus en plus. Finalement arrêtés et condamnés à mort, ils entrent dans la légende lorsque la propagande fasciste les présente comme l’Armée du crime et publie leurs photos sur une affiche placardée dans toutes les villes françaises.

Robert Guédiguian, cinéaste engagé, honnête, loyal et conséquent avec ses convictions, n’a pas encore réglé ses comptes avec le Parti communiste pour lequel il a milité autrefois. Aujourd’hui membre du Parti de gauche, généré en France l’automne dernier par la crise mondiale et fondé en février de cette année, il continue à défendre la solidarité, se disant troublé par le fait que l’idée communiste annoncée par le philosophe Alain Badiou semble bien éloignée de toute concrétisation. Ce communisme non pas idéologique et despotique, mais généreux et libérateur. Pour Guédiguian, parler des immigrés juifs de l’Armée du crime c’est rappeler cet élan. Il y ajoute la préoccupation de recoudre les liens entre une période où le militantisme était vécu corps et âme et la réalité contemporaine d’un Parti communiste qui se replie peu à peu dans l’oubli.

Ainsi, L’Armée du crime est-il avant tout un film historico-politique. Beau film, au demeurant, bien construit, soigné dans sa reconstitution (à part celle de la langue qui en reste aux travers du français de 2009), mis en scène selon les meilleures qualités classiques. Robert Guédiguian a voulu en faire «un film national populaire», c’est exactement l’impression qu’il en donne, très agréable à voir, émouvant, laissant s’ouvrir la possibilité de comparer l’engagement d’hier à celui d’aujourd’hui.

Aurait-il pu être autre chose? Sans doute, si au lieu d’en rester à cette fresque attachante et exemplaire, le cinéaste avait creusé les interrogations qu’il met dans la bouche de Missak Manouchian: le refus de tuer, le bien-fondé d’un attentat qui entraîne la mort de plusieurs otages, la suspicion qui s’attache à la libération d’un prisonnier politique… Ce sont des questions essentielles qui s’enracinent dans une société en guerre. Dans L’Armée du crime, elles restent en filigrane, laissant le film de Guédiguian échapper au rang d’œuvre fondamentale.

Geneviève Praplan

Appréciations

Nom Notes
Geneviève Praplan 15
Georges Blanc 13
Daniel Grivel 14