Moloch

Affiche Moloch
Réalisé par Alexandre Sokourov
Pays de production Russie, France, Japon, Italie, Allemagne
Année 1999
Durée
Genre Drame
Acteurs Leonid Mosgovoi, Elena Rufanova, Leonid Sokol, Elena Spiridonova, Vladimir Bogdanov
N° cinéfeuilles 373

Critique

"Décrire un week-end de 1942 passé au ""Nid d'aigle"" de Berchtesgaden par Hitler et ses proches est un défi qui n'a pas fait peur au cinéaste russe Sokourov (MERE ET FILS). Dans une réalisation tout à la fois réaliste et fantastique, il raconte la banalité des dialogues et les rapports étranges qui unissaient le dictateur et sa compagne Eva Braun, ainsi que Martin Bormann et le couple Goebbels.

La réalité, c'est essentiellement les propos que tiennent ces personnages historiques. Aussi absurdes qu'ils paraissent, ils sont tirés du journal que tenait scrupuleusement le secrétaire personnel d'Hitler. Ainsi Eva s'adressant à son compagnon: ""... mon père en 1929 a dit: ce jeune homme est un moins que rien... Il s'est cruellement trompé. Tu l'as mouché, comme tu as mouché des millions de gens. Et même si tu étais un moins que rien! Et alors? Je t'aime avec toutes tes faiblesses, toute ta nullité... Tu peux rester un moins que rien"".

Mais le fantastique qui donne du recul transforme le film en dérision. Sokourov et son opérateur ont choisi une lumière et des couleurs qui créent une sorte de flou artistique parfois difficile à supporter. Le jeu des acteurs contribue aussi fortement à ce décalage. Comme toute l'atmosphère trouble qui pèse de tout son poids et fait ressortir le caractère démoniaque de ce personnage. C'est d'autant plus fort qu'il n'y a presque aucune allusion à la situation politique ou militaire.

Sokourov a voulu démythifier le monstre nazi (Moloch, divinité monstrueuse et malfaisante) en le montrant sous son jour le plus humain. Au-delà de cette page d'histoire, il se livre à une charge contre tous ceux qui, parvenus au pouvoir, se prennent pour des dieux. Et du coup, il condamne toutes les formes de fascination et de fanatisme qui conduisent les foules à marcher au pas."

Maurice Terrail