Thirteen Days

Affiche Thirteen Days
Réalisé par Roger Donaldson
Pays de production U.S.A.
Année 2000
Durée
Musique Trevor Jones
Genre Thriller, Guerre
Distributeur Metropolitan FilmExport
Acteurs Kevin Costner, Bruce Greenwood, Drake Cook, Steven Culp, Shawn Driscoll
N° cinéfeuilles 418
Bande annonce (Allociné)

Critique

"Facile aujourd'hui - après la chute du Mur de Berlin et du communisme - de tourner nos regards vers la crise des missiles cubains (octobre 1962), puisque la pression est tombée et que le monde a changé. Mais quelle gageure pour Hollywood d'en tirer une fiction crédible!

Le 16 octobre 1962, aux heures les plus tendues de la guerre froide: des avions de reconnaissance américains repèrent sur le territoire cubain la présence de missiles terre-terre livrés par les Russes et en phase d'installation. Huitante millions d'Américains pourraient être anéantis en cinq minutes si ces missiles devenaient opérationnels (si rien ne se passe, ils le seront en quelques jours). Le gouvernement américain ne peut évidemment tolérer cette épée de Damoclès. Il doit riposter. Mais comment? Ainsi surgit la menace d'une 3e guerre mondiale, nucléaire celle-là.

Le film prend comme point de vue celui d'un trio, enfermé dans une sorte de huis clos psychologique de treize jours: JF Kennedy, son frère Bob, alors ministre de la Justice et Kenny O'Donnell, conseiller politique personnel du président (Kevin Costner). Confrontés à une situation mettant en jeu l'existence même de la planète, ces trois hommes doivent faire face à la fois aux stratégies de l'ennemi soviétique et à celles de leurs propres chefs d'état-major, fervents partisans de la riposte immédiate et armée. De rebondissements en rebondissements, le film progresse, maintenant tant bien que mal un suspense musclé pendant près de 2 h 30.

Le scénario met en évidence les efforts incessants mis en œuvre par les frères Kennedy pour éviter l'affrontement. Le spectateur est plongé dans les coulisses d'un drame historique, découvrant trois hommes de bonne volonté luttant avec intelligence et détermination - y compris contre certains de leurs compatriotes - pour que la guerre n'ait pas lieu. Dans la démonstration du subtil équilibre à tenir entre force, diplomatie et compromis, entre savants calculs stratégiques et intuitions politiques, réside l'intérêt de cette fresque.

La brèche pratiquée contre le manichéisme habituel - USA-URSS - est un atout du film: ici en effet, tout ce qui est américain n'est pas forcément bon (cela rappelle PLATOON d'Oliver Stone). Le sérieux du scénariste David Self y est pour beaucoup: il a analysé une foule de livres, rapports, documents de presse ou d'archives, de conversations enregistrées à la Maison blanche et diverses autres sources relatant cet épisode. Le bureau ovale du président a quant à lui été méticuleusement reconstitué et certains dialogues du film sont repris mot pour mot des bandes enregistrées à la Maison blanche, nous certifie le dossier de presse.

Tout cela ne suffit pourtant pas à dissiper nos doutes. De quelle épaisseur et - surtout - de quelle opacité est donc la couche de ""pommade"" que la fiction ajoute à l'événement? Et quelle part de l'Histoire ce film au son de cloche unilatéral retranche-t-il ou déforme-t-il? Aucun doute: le documentaire eût été plus adéquat que les fastes hollywoodiennes pour aborder un sujet où la vérité historique a tant d'importance. Que fallait-il donc prouver avec THIRTEEN DAYS, et à qui? C'est peut-être la question qui reste en travers de la gorge à l'issue de la projection. Fallait-il honorer la mémoire des frères Kennedy (assassinés peut-être en raison de leur lutte pour la paix, après tout)? Ou décrire plus justement la politique américaine dans cette période troublée, en relevant notamment les dissensions internes?

Si THIRTEEN DAYS parvient à inspirer favorablement des politiciens et des stratèges confrontés dans l'avenir à des situations analogues (ou pires), tous ses défauts lui seront pardonnés. Car une chose est sûre: depuis 1962, l'arsenal nucléaire planétaire a décuplé et la manie de la guerre n'a toujours pas été éradiquée."

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