Lantana

Affiche Lantana
Réalisé par Ray Lawrence
Pays de production Allemagne, Australie
Année 2001
Durée
Musique Paul Kelly (III)
Genre Policier
Acteurs Geoffrey Rush, Barbara Hershey, Anthony LaPaglia, Kerry Armstrong, Rachel Blake
Age légal 12 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 442
Bande annonce (Allociné)

Critique

LANTANA, film australien de Ray Lawrence, est une heureuse surprise. Derrière une intrigue classique (la disparition d'une femme) se développe une analyse en profondeur d'une petite société. Une étude fine en même temps qu'un film abouti.

Un lantanier, pour ceux qui l'ignorent, est en apparence un joli buisson aux belles fleurs exotiques. Mais derrière cette beauté se cache une broussaille épaisse faite de méchantes épines. Voilà pour le symbole: le cinéaste cherche à montrer, au-delà de l'apparente normalité des êtres, la face cachée d'une dizaine de personnages touchés par un drame qui servira de révélateur. On découvre alors un labyrinthe de mensonges et un sérieux entrelacs de trahisons amoureuses.

Au premier abord l'histoire apparaît banale. Il y a bien Léon (Anthony LaPaglia), policier et père de famille quelque peu gêné d'avoir trompé sa femme. Il y a peut-être aussi Jane (Rachel Blake), la voisine rêveuse et esseulée, un peu aguicheuse. Il y a encore, tout près, Nick et Paula, un jeune couple, et l'étrange Sommers (Geoffrey Rush), mari de Valérie (Barbara Hershey), une psychanalyste qui reçoit précisément comme patiente Sonja (Kerry Armstrong), la femme de Léon... Mais jusque-là rien de très surprenant, rien de très grave.

Or un jour Valérie disparaît. Et chacun de commencer à suspecter son voisin, en mettant par là même en plein jour ses propres limites, ses propres carences. L'enquête policière va amener tout ce monde à faire le point, à poser cartes sur table, chaque révélation en amenant une autre, chaque question faisant apparaître un versant obscur, un peu triste, un peu gris de l'être. La disparition de Valérie trouve ainsi de multiples échos dans l'existence de tout son entourage.

LANTANA ne s'égare jamais dans la convention (ou les méandres) d'une enquête policière (même si on pense par moments à Hitchcock). Le cinéaste ne cherche pas à tout expliquer, laissant simplement entendre qu'il s'agit plutôt, dans ce drame, d'un accident. Adaptation intelligente d'une pièce de théâtre (d'Andrew Bovell), LANTANA est un film sur la fragilité des êtres, sur les difficultés de l'existence du couple et de la famille, sur les moments de la vie où l'on se remet en question, où l'on se demande comment on a pu en arriver là... Le cinéaste passe d'un personnage à un autre, construisant patiemment, morceau par morceau, un puzzle assez complexe qui laissera apparaître, d'abord en filigrane, puis de plus en plus nettement, le portrait de chacun et celui de toute la petite société locale.

Ray Lawrence (cinéaste et scénariste australien peu connu chez nous - il a tourné BLISS, en 1986, et plusieurs films publicitaires -) a pu compter sur d'excellents acteurs, en tête desquels il faut citer Anthony LaPaglia, interprète de Léon, ce personnage un peu lourdaud placé au carrefour des relations, comme au centre d'une toile d'araignée où viendront s'empêtrer, les uns après les autres, tous les personnages. Image de la complexité des relations humaines où chaque existence semble s'enchevêtrer dans celles des autres, LANTANA est un film surprenant et beaucoup plus profond qu'il n'en a l'air. Les qualités du montage - retenu et subtil, on pense souvent à la structure segmentée de SHORT CUTS, de Robert Altman - permettent de guider le spectateur en lui glissant peu à peu et subrepticement les indications nécessaires, mais sans le laisser prendre le pas sur l'histoire, sans lui forcer la main. Un film intéressant et sensible, avec des personnages finalement très attachants.

Antoine Rochat