Infidèle

En 1968, Claude Chabrol avait tourné LA FEMME INFIDELE. Trente ans plus tard la Fox et Adrian Lyne s'en viennent - en mal d'inspiration - puiser dans les tiroirs du cinéaste français et lui emprunter une bonne partie de son intrigue: dans ce remake hollywoodien, Richard Gere remplace Michel Bouquet, et Diane Lane fait de même avec Stéphane Audran. Le résultat? Un mélodrame policier longuet, où l'on trouve un peu de tout, mais rien d'intéressant. Un mari fatigué (Edward Sumner), une femme oisive (son épouse Connie) qui s'amourache d'un libraire français (Paul Martel) plus porté sur la chose que sur la vente de livres anciens, voilà pour les trois personnages du triangle habituel. L'affaire tournera mal.

Là où Chabrol avait réussi à montrer comment les rapports d'un couple peuvent, à partir d'une situation initiale qui paraît harmonieuse, glisser d'abord vers la simple apparence du bonheur, puis se craqueler et se briser, pour retrouver finalement, avec le drame, une nouvelle forme d'équilibre, le cinéaste britannique ne fait que raconter une histoire, sans mettre en évidence les signes (et le pourquoi) de cette dégradation du couple, sans laisser apparaître les non-dits ni laisser entrevoir quoi que ce soit d'une évolution subtile des sentiments. INFIDELE est pesamment mis en images, avec une caméra particulièrement complaisante dans les scènes de sexe (on retrouve le cinéaste de LIAISON FATALE, PROPOSITION INDECENTE, etc.). La lente dérive d'Edward, qui perd pied et devient meurtrier, est escamotée, le film se traîne, l'image est plate et le dialogue convenu. L'autre intérêt de l'intrigue - pourquoi le mari reprend-il à son compte, dans une sorte de complicité tacite, l'infidélité de sa femme? - est à peine esquissé. Dans ce mélange de thriller et de mélodrame indigeste les acteurs ne trouvent jamais leurs marques et personne ne se tire d'affaire. On ne demandait pas bien sûr à Adrian Lyne de rester fidèle au film de Chabrol: on aurait souhaité tout de même pouvoir s'intéresser à quelque chose...