Fremont

Affiche Fremont
Réalisé par Babak Jalali
Pays de production États-Unis
Année 2023
Durée
Musique Mahmood Schricker
Genre Comédie , Drame
Distributeur trigon-film
Acteurs Jeremy Allen White, Anaita Wali Zada, Gregg Turkington
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 917

Critique

Donya (Anaita Wali Zada) est une jeune réfugiée afghane. Elle vit seule dans la petite ville américaine de Fremont et travaille dans une usine qui fabrique les célèbres petits biscuits chinois contenant des messages porte-bonheur. En proie à des troubles du sommeil, elle rencontre un psy, puis un garagiste solitaire. Tous deux lui seront d’une grande aide philosophique dans sa quête de paix intérieure et d’une vie meilleure. Elle enverra d’ailleurs un de ces biscuits, comme une délicate bouteille à la mer à qui voudra bien la lire.

Fremont est un film étonnant, à tous points de vue. Par sa forme, d’abord. Une mise en scène calme et introspective, exclusivement concentrée sur les visages, jamais plombante. Servie par une image carrée et un magnifique noir et blanc qui représentent intelligemment les peurs et les espoirs du personnage principal. Cette grande élégance visuelle est accentuée par la direction d’acteurs, les menant à un jeu parfois peu naturaliste, mais solennel et profond, rappelant certains personnages d’Aki Kaurismäki. Alors que, chez le cinéaste finlandais, cela peut passer pour de la fabrication (un filon que l’on exploite et qui n’est pas toujours d’une grande sincérité, on pense notamment à Le Havre), Babak Jalali en fait une réelle volonté narrative qui décuple la force du récit.

Ce parti pris demande au spectateur, durant les premières minutes, un effort de concentration et d’investissement émotionnel, jusqu’à ce qu’il comprenne où le film veut l’emmener. Il se laisse alors faire avec intérêt et confiance. Fremont est, de plus, très bien écrit. Cette histoire au fond simple, douce et humaine, se révèle rapidement captivante. Elle peut à certains égards rappeler Ken Loach, l’aspect politique en moins, car le message du film ne se veut pas universel. Loach aurait peut-être fait de Donya une ouvrière maltraitée et exploitée, ce qui n’est nullement le cas ici. Son entourage est bienveillant à son égard. L’émotion est juste, par exemple lors d’une scène où Donya et son voisin philosophent en observant les étoiles du ciel d’Amérique qui semblent ne pas se comporter comme dans celles d’Afghanistan. L’humour n’est pas absent, grâce à des personnages secondaires comme la collègue d’usine, le voisin et le psy. Surtout quand celui-ci lit à sa patiente des passages de Croc-Blanc afin de lui faire ressentir de la tendresse, et qui ne peut retenir ses larmes.

«Rien n’est permanent dans ce monde, pas même nos problèmes», disait Chaplin. Grâce à des personnages (y compris secondaires) très intéressants, ce film qui nous parle sans pathos de courage, de déracinement, de culpabilité, de peurs, d’espoirs, de mélancolie, de solidarité et de beauté est une formidable démonstration de cette maxime. Fremont et la douceur qu’il distille sont à ne pas manquer.


Philippe Thonney

Appréciations

Nom Notes
Philippe Thonney 17