L’Arbre aux papillons d’or

Affiche L’Arbre aux papillons d’or
Réalisé par Pham Thiên Ân
Titre original BÊN TRONG VÒ KÉN VÀNG
Pays de production Viêt Nam, France, Espagne, Singapour
Année 2023
Durée
Genre Drame
Distributeur Sister
Acteurs Le Phong Vu, Nguyen Thinh, Nguyen Thi Truc Quynh
Age légal 12 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 913

Critique

La vie intérieure est une respiration que la frivolité contemporaine étouffe. Thien en fait l’expérience. Ce beau film vietnamien va l’amener de la ville à la campagne, du matérialisme à la spiritualité, pour montrer avec beaucoup de pertinence où se trouve la paix véritable.

Saïgon (Hô Chi Minh-Ville) est un bouillonnement de lumières colorées, de bruits, de publicité et de consommation. Au cœur de cette agitation, Thien (Le Phong Vu) ennuie ses amis, peu intéressés par ses questionnements sur la foi. Les circonstances vont l’aider à trouver son chemin, car, après que sa belle-sœur est tuée dans un accident de moto, il va devoir ramener la dépouille dans son village natal, recueillir son neveu de 5 ans, et rechercher son frère, le mari disparu.

La route est longue de Saïgon à la province reculée d’où vient la famille, le film aussi. Le temps est ainsi donné pour se défaire des scories du quotidien, de l’aveuglement qui jette l’individu dans une interminable fuite en avant. Le rite des funérailles signe le retour à l’enfance; celle de Thien a été catholique, et dans ces villages isolés tout le lui rappelle: les croix des églises, les autels particuliers dans les maisons, les statuettes de plâtre peint, le Christ, la Vierge veillant sur les photos de défunts.

Mais plus forte que celle de ces réminiscences est l’emprise du paysage. Une respiration puissante se dégage des forêts, des collines, de la pluie même qui tombe à verse dans le rythme de la mousson. Elle rassure, revigore, redonne son unité au corps et à l’esprit. Thien y trouve l’ampleur nécessaire à son introspection tandis que se précisent sa personnalité et son passé.

La mise en scène est rigoureuse. Le réalisateur soutient la quête de son personnage par un grand nombre de plans fixes, procédé qui, là encore, laisse le temps se déployer infiniment. Les images s’affermissent à la faveur d’un éclairage, d’un rapprochement. Dans les images, le champ et le hors-champ interagissent sans cesse, se répondent, comme ce coq qui chante l’aube et attend la réponse de son frère, ailleurs dans la campagne, bien au-delà du cadre.

Il existe par ailleurs une constante dans L’Arbre aux papillons d’or: la relation entre l’intérieur et l’extérieur, comme l’idée qui entre et pénètre la conscience. Cela commence par le téléphone auquel Thien ne répond pas. Objet d’utilisation futile qui, cette fois-ci pourtant, lui annonce l’accident de sa belle-sœur. On voit aussi, dans beaucoup de plans, des fenêtres, des portes qui évoquent des passages. On y comprend l’inlassable va-et-vient qu’effectue Thien entre les sollicitations du «dehors» et ses besoins intérieurs. Peu à peu, la nature va s’imposer et se confondre avec son âme.

«Je voulais créer une opposition et une confrontation permanente à plusieurs échelles. Entre la vie en ville et celle de la campagne, entre la vie intérieure et extérieure du personnage, entre la spiritualité et une vie matérielle banale», explique Pham Thiên Ân, qui, à 34 ans, réalise ici son premier long métrage. D’emblée L’Arbre aux papillons d’or s’impose comme une magnifique expérience, dans laquelle l’esthétique et la méditation ne font qu’un, sans la moindre difficulté. Du reste, le film a remporté la Caméra d’or à la Quinzaine des cinéastes, lors du dernier Festival de Cannes.


Geneviève Praplan

Appréciations

Nom Notes
Geneviève Praplan 18
Marvin Ancian 15
Joas Maggetti 17
Pierig Leray 17