Simple comme Sylvain

Affiche Simple comme Sylvain
Réalisé par Monia Chokri
Titre original Simple comme Sylvain
Pays de production France, Canada
Année 2023
Durée
Musique Emile Sornin
Genre Comédie dramatique, Romance
Distributeur Frenetic
Acteurs Monia Chokri, Pierre-Yves Cardinal, Magalie Lépine-Blondeau, Francis-William Rhéaume
Age légal 14 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 912

Critique

Dans cette comédie hilarante sur les rapports de classe, Monia Chokri fait de la simplicité un principe esthétique.

La grande intelligence de Simple comme Sylvain réside dans l’absolue conscience de ses procédés formels et narratifs. L’on pourrait à ce titre reprocher au film de ne pas renouveler la représentation de la classe prolétaire et de la bourgeoisie à l’écran. La bourgeoise Sophia (Magalie Lépine-Blondeau) étant une prof de philo cultivée et racée et le «prolo» Sylvain (Pierre-Yves Cardinal), un «simple» ouvrier un peu beauf et pas totalement «déconstruit» sur certaines problématiques dites «sociétales», telles que le féminisme et l’antiracisme. Cependant, ce reproche ne tient pas dans la mesure où Monia Chokri n’en est absolument pas dupe, car elle assume totalement, au contraire, d’épouser les clichés pour en tirer une matière comique. La veine de son film est ainsi vaudevillesque, d’une grande modestie, ne prétendant jamais produire un quelconque discours politique. Elle s’amuse plutôt avec différentes situations sociales paradigmatiques de l’opposition de classe (par exemple, ce fameux repas chez la belle-famille) qui sont souvent dramatisées dans bien d’autres films, comme dans La Vie d’Adèle.

Mieux: le déplacement comique permet de neutraliser la problématique sociale, pour laisser la place à une réflexion sur l’amour bien plus philosophique et universelle. L’amour se confond-il avec le désir, voire la pulsion? Peut-on décider d’aimer quelqu’un? Peut-on cultiver l’amour, le domestiquer? Ou alors en sommes-nous prisonniers? Ces questions sont traitées explicitement par le film lors d’intermèdes malins, dans lesquels Sophia qui est, on le rappelle, prof de philo, vulgarise justement certaines conceptions célèbres de l’amour. Parmi Platon, Spinoza, Schopenhauer ou Bell Hooks, le film ne tranche jamais franchement. On peut cela dit supputer qu’il se rapproche plus d’une vision spinozienne, mettant le désir au centre de sa mise en scène. Les nombreux zooms, ainsi que certains subtils mouvements de caméra semblent en effet traduire la subjectivité désirante de Sophia. De même, les différentes scènes de sexe sont très charnelles et sensuelles: filmées à même les peaux, elles retranscrivent très justement et réalistement les émotions et sensations des personnages. Ces choix de mises en scène, certes simples (mais la simplicité n’est-elle pas une qualité au cinéma?), font de Simple comme Sylvain une fable puissante sur l’amour, en plus d’être drôle. Le film n’est certes pas un chef-d’œuvre; nous pourrions, par exemple, regretter un manque de radicalité formelle. Nous avons, cela dit, bon espoir que Monia Chokri étoffe encore un peu plus sa mise en scène dans ses prochaines créations.

Tobias Sarrasin

Appréciations

Nom Notes
Tobias Sarrasin 14