Le Consentement

Affiche Le Consentement
Réalisé par Vanessa Filho
Titre original Le Consentement
Pays de production France, Belgique
Année 2023
Durée
Musique Audrey Ismael, Olivier Coursier
Genre Drame, Biopic
Distributeur Praesens-Film
Acteurs Jean-Paul Rouve, Laetitia Casta, Kim Higelin
Age légal 18 ans
Age suggéré 18 ans
N° cinéfeuilles 912

Critique

C’est l’histoire de Vanessa (Kim Higelin), une jeune adolescente, qui, dans un silence assourdissant de l’intelligentsia parisienne de l’époque, est prise dans les tenailles d’un monstre pédophile, l’écrivain Gabriel Matzneff (Jean-Paul Rouve). Le Consentement est l’adaptation du livre choc de Vanessa Springora sorti en 2020.

Le grand enjeu du film se place sur la pertinence de l’image sur le mot, car une adaptation cinématographique doit passer par une relecture visuelle et installer une mise en scène, afin d’offrir, soit un angle novateur sur l’histoire qu’il conte, soit un esthétisme qui dépasse le factuel des écrits. Malheureusement, Vanessa Filho se vautre à double titre. En premier lieu, par sa mise en scène démonstrative et obscène: les scènes de sexe entre Vanessa, cette adolescente de 14 ans, et Matzneff, se succèdent dans un voyeurisme qui n’a ni enjeu ni intérêt à sa lecture. En second lieu, dans sa direction d’acteur: elle place Jean-Paul Rouve dans un surjeu cabotinant, l’affublant d’une diction qui s’appuie sur chaque syllabe, jusqu’à en devenir pesante. Pire, Rouve occupe tout le cadre, au détriment d'Higelin (sa victime à l'écran), et dont on ne s’intéresse finalement guère. Cette ignoble romance se base donc sur une philosophie de comptoirs édulcorée et peu reluisante. Pour schématiser, elle induit l’histoire d’une ado perdue, en manque de repère paternel, qui ne peut que tomber sous l’étreinte d’un homme mûr. Ce destin tragique et ce sujet profondément sociétal auraient mérité un meilleur sort. Par exemple, en lui offrant une approche bien plus analytique, et mettant au ban le «monstre», l’attention se serait bien plus portée sur la profonde détresse de Vanessa. Ce qui aurait été un choix narratif bien plus judicieux.

L’autre grand échec du film est la mise sous cloche d’une forme d’élan acceptatif, voire amusé du monde culturel de l’époque, laissant Matzneff s’adonner à toutes les exactions les plus répugnantes. Il n’avait d’ailleurs pas à se soucier d’une quelconque mise à l’écart. Il décrivait déjà ses actes pédophiles à Manille dans de précédents livres, et s’exposait sans honte avec de nombreuses jeunes filles en plein Saint-Germain. Là encore, cet angle aurait également pu être approfondi par une recherche sur les causes profondes de cette omerta. Malheureusement, Filho n’en fait rien, si ce n’est l’évoquer par une fameuse image d’archive de l’émission Apostrophes, présentée par Bernard Pivot. Pour contrebalancer cet échec, le rôle de la mère de Vanessa, jouée par Laetitia Casta, parvient à sauver un peu le film. A l’origine des scènes les plus glaçantes– elle qui en vient à littéralement offrir sa fille à son bourreau et l’invitant même à dîner -, elle est dépeinte comme une personne totalement désœuvrée par un alcoolisme qui la rend insensible à l’horreur de ses actes. Elle est en fait le personnage le plus ambigu et troublant du film, car il se démarque d’un manichéisme souvent inhérent à cette sordide histoire de «monstre» et de victime.

La version cinématographique de Consentement est donc d’un intérêt fort limité, face au séisme du livre de Springora, trois ans plus tôt. Mais ce film aura néanmoins réussi à nous rappeler que la «monstruosité» a beau se parer du plus beau costume, elle n’en reste pas moins monstrueuse, et qu’importe le statut de l’auteur dont il est question; un indispensable rappel à marteler, malgré les avancées notables post-#MeToo.


Pierig Leray

Appréciations

Nom Notes
Pierig Leray 8