Inestimable

Bon. Voyons le verre à moitié plein. Le film n’est pas prétentieux, racoleur ou imbu de soi, et il ne prend pas le public pour des décérébrés. On n’est pas chez Dany Boon ou chez Philippe Lacheau et consorts. Mais pour une comédie, Inestimable est parfaitement passe-partout, sans prise de risque ni vraie personnalité, malgré un point de départ qui aurait pu être prétexte à innovation. Rien de nouveau sous le soleil de Corse.

À peine quelques mois après la sortie de son film Le Clan, Eric Fraticelli remet ça avec ce nouvel opus qu’il écrit, dirige et interprète. Malheureusement pour lui, deux films moyens n’en font pas un bon. C’est inspiré de l’histoire vraie de trois plongeurs qui, en 1985, découvrent une fortune colossale sous la forme de pièces d’or romaines près des plages corses du golfe de Lava. Ils deviendront très riches en vendant sous le manteau, et sans le déclarer évidemment, ce trésor à des collectionneurs avec la complicité d’un numismate. Bien sûr, ils seront coincés et condamnés pour escroquerie. Le cinéaste nous narre donc l’histoire de trois bras cassés, dépassés par leur découverte. Le film aurait pu être une comédie réussie sur une magouille de haut vol, abordant également les conséquences qu’une richesse soudaine aurait exercées sur l’amitié des protagonistes. Mais tout cela n’est qu’à peine effleuré. Les clichés et les caricatures abondent (ah, le personnage joué par Michel Vuillermoz!) Le côté «comédie tous publics» du film semble avoir empêché l’équipe d’aller vers le mordant, le subtil ou, par moments, une vraie émotion. À peine encaissées leurs premières liasses, les personnages ne songent qu’à parader avec des montres de luxe ou des voitures de sport. Tous trois ont des femmes qui leur coûtent cher (une mère Alzheimer pour l’un, une épouse et une ex pour les autres). Il y a bien quelques sourires dus à certains dialogues, mais ils restent timides, et ce d’autant plus qu’ils sont accompagnés d’effets musicaux qui annoncent ou soulignent les gags.

Les acteurs se débrouillent bien pour y croire. Didier Bourdon a suffisamment d’expérience pour mener sa barque et Eric Fraticelli fait aussi le boulot. Le plus intéressant est Philippe Corti, plutôt connu comme animateur et DJ que comme comédien, mais qui est à l’origine des sourires les plus francs et des pointes d’émotion. La mise en scène est soignée et réussie.

On se demande quand même si, en leur temps, des gens comme Yves Robert, Francis Veber ou l’équipe du Splendid n’auraient pas définitivement innové. N’auraient-ils pas découvert tout ce qu’il restait à découvrir dans le domaine de la comédie efficace, à la fois intelligente, mordante et hilarante? On souhaite que non, on veut croire que non. On se le demande, car en guise de morale d’une comédie censée explorer la nature humaine, «ce que tu ne peux pas avoir avec de l’argent, tu peux l’avoir avec beaucoup d’argent», c’est maigrelet.