Les Feuilles mortes

Affiche Les Feuilles mortes
Réalisé par Aki Kaurismäki
Titre original KUOLLEET LEHDET
Pays de production Finlande
Année 2023
Durée
Musique Pietu Korhonen
Genre Comédie romantique
Distributeur Filmcoopi
Acteurs Janne Hyytiäinen, Nuppu Koivu, Alma Pöysti, Jussi Vatanen
Age légal 12 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 907

Critique

Helsinki 2023, ou comment peut-on encore vivre nos émotions les plus simples sous la menace d’une invasion russe. Des couleurs vives délavées à l’image et une caméra frontale appuyant l’humour de certaines situations nous plongent dans la froideur absurde de ces personnages presque prisonniers de ce territoire d’abord dominé par la Suède jusqu’au XIXe siècle avant d’être sous emprise russe jusqu’à la révolution soviétique. Une mise en scène sympathique, mais qui ne rattrape pas la banalité du récit.

Ansa (Alma Pöysti), employée de supermarché, et Holappa (Jussi Vatanen), ouvrier dans la métallurgie, des pures prolétaires, se rencontrent par hasard et tombent amoureux. Entre malchance et chance, ils se reverront, puis plus, puis à nouveau, au fils des péripéties qui rythment cette histoire. En toile de fond donc, cette radio qui commente l’avancée de l’armée russe en Ukraine, radio que l’on éteint uniquement pour économiser l’électricité en raison de l’inflation générée par ce conflit du prix de l’énergie. À l’inverse d’un Andreï Zviaguintsev avec Faute d’amour (six ans plus tôt) ou d’un Ivan I. Tverdovsky avec L'Insensible (cinq ans plus tôt) qui fonctionne par comparaison/métaphore dans le registre dramatique, les enfants abandonnés des deux films sont comparés à une Russie délaissée par ses politiques, en évoquant explicitement les tensions avec l’Ukraine pour le cas de Faute d’amour, Aki Kaurismäki travaille le clash d’expériences. Si le but est de faire «clasher» la banalité du récit amoureux avec la menace russe, les émotions que nous procure cette œuvre sont justement assez banales elles aussi. Peut-être que l’aversion aux descriptions de ce conflit qui agite si violemment l’occident (alors que bon, il existe des conflits tout aussi importants sur d’autres continents), est dû à cette position privilégiée et insouciante qu’est celle d’une personne basée en Suisse, enfin force est quand même de constater que si le film se fait probablement remarquer à Cannes, il y gagne le Prix du Jury, il faut bien admettre que c’est grâce ou à cause de son message politique (à ce propos, en 2017, le film de Zviaguintsev gagnait lui aussi le même prix). Or cette formule s’épuise assez vite.

Sur l’humour, c’est peut-être là le point fort du film, nous apprécions les situations presque burlesques qui esquissent sur nos visages plus d’un sourire. Par l’humour nous observons ces prolétaires exploités par le pouvoir ou la prétention du pouvoir. L’usage des couleurs déjà mentionné appuyant justement également sur le fantasme capitaliste d’une industrie florissante, puisque sont colorés des éléments liés à la production industrielle, comme des containers ou des machines, qui par un rendu de couleur délavée, démystifient le fantasme et appuie sur la sensation de ce climat agressif (à la fois le froid nordique et l’indifférence du capitalisme). On ne saura que féliciter Timo Salminen, le chef-opérateur d’Aki Kaurismäki. Sur la question de la chance et du hasard, il y a aussi peut-être quelque chose de l’ordre de la filmographie de Woody Allen (dans ce numéro de Ciné-Feuilles, une critique de son dernier film!) Enfin sur les personnages, ils nous font penser par moments à ceux du voisin Ingmar Bergman, en particulier l’acolyte de Holappa, Huotari (Janne Hyytiäinen), qui nous fait penser à l’acolyte de Don Juan dans L’Œil du diable (1960) joué par Sture Lagerwall. Il y a tout de même un peu de finesse dans ce film.

Ani Gabrielyan

Appréciations

Nom Notes
Ani Gabrielyan 11
Marvin Ancian 17
Pierig Leray 16
Tobias Sarrasin 8