Strange Way Of Life (+ La Voix humaine)

Affiche Strange Way Of Life (+ La Voix humaine)
Réalisé par Pedro Almodóvar
Titre original Strange Way Of Life (+ The Human Voice)
Pays de production Espagne
Année 2022
Durée
Musique Alberto Iglesias
Genre Drame, Western
Distributeur Pathé Films
Acteurs Ethan Hawke, Tilda Swinton, Pedro Pascal
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 904

Critique

Présenté en avant-première au Festival de Cannes, Strange Way Of Life est une excellente surprise. Si nous pouvons saluer le geste des distributeurs de nous permettre le visionnement de courts métrages à l’heure où la longueur standard d’un film semble se bloquer autour des trois heures, nous devons aussi admettre que les qualités cinématographiques du film d’Almodóvar étaient au rendez-vous.

Le réalisateur revisite le genre du western pour y raconter une histoire d’amour homosexuel. En se réappropriant ce genre prédominé par des hommes dans leur masculinité à la plus haute hétéronormativité, le réalisateur espagnol explore un champ de fantasme sans non plus s’y arrêter. L’histoire des retrouvailles du shérif Jake (Ethan Hawke) et de Silva (Pedro Pascal) nous surprendra de sa complexité, tant elle est riche en émotions et rebondissements, allant de l’expérience du plus charnel à la découverte du plus vil ressentiment. Nous nous surprenons alors à enquêter sur les intentions de l’un et de l’autre, tout en questionnant la valeur du bien et du mal, question fondamentale qui traverse le genre du western. À ce titre, nous sentons bien que la réappropriation du genre vient aussi d’une véritable admiration pour ce dernier. Quant à l’homosexualité/bisexualité des personnages, si une pression sociale est évoquée/peut être pressentie, nous avons apprécié qu’elle ne soit pas le sujet central pour autant. Elle est exposée comme un fait et n’est pas remise en question.

Strange Way Of Life est véritablement le cœur de la double séance Almodóvar, mais nous pouvons consacrer quelques mots également de la première partie du programme. Achevé en 2020, La Voix humaine, adapté librement de la pièce éponyme de Jean Cocteau, nous a moins pris aux tripes. Ce récit d’une femme abandonnée par son amant nous a paru plus anecdotique. Construit en tirades clamées par Tilda Swinton dans un appartement en studio dont l’artificialité est mise en scène, ce court expérimental nous semble assez vieillot dans son concept. Même la performance de Tilda Swinton, qui est sans doute une des actrices contemporaines de cinéma les plus importantes, si elle est toujours sympathique, elle peine à nous surprendre tant elle dégage que des expressions archétypales de son type de rôles. S’il est vrai que le film propose un discours qui aurait pu être une réflexion intéressante sur la question du jeu d’acteur, puisque le développement du personnage se joue au niveau de la mise en scène de son malheur, et alors nous sommes amenés à jouir du fait métatextuel de voir une actrice jouer un personnage en train de jouer un rôle, nous préférons recommander à nos lecteurs de voir ou revoir quelque chose tiré de la filmographie de John Cassavetes, peut-être Opening Night (1977). Alors même que La Voix humaine s’inscrit dans une continuité explicite de femmes fortes au cinéma, nous y voyons la collection de DVD du personnage principal, Kill Bill: Volume 1 (Quentin Tarantino, 2003, avec Uma Thurman), Jackie (Pablo Larraín, 2016, avec Natalie Portman) ou encore Ecrit sur du vent (Douglas Sirk, avec Lauren Bacall), cette représentation n’a rien à envier aux personnages féminins chez Cassavetes incarnés par la spectaculaire Gena Rowlands. Enfin, sur les quelques points positifs, certains éléments du décor sont tout de même appréciables, comme toujours avec les films de Pedro Almodóvar, et nous avons apprécié la relation du personnage principal avec le chien de son amant.

Ani Gabrielyan

Appréciations

Nom Notes
Ani Gabrielyan 12
Pierig Leray 10