La Main

Acclamée pas la critique, la dernière production de A24 signée par deux frères australiens réouvre la porte du cinéma d’horreur à la sauce démoniaque, qui pique pour de vrai. La main explore les nouvelles obsessions morbides de notre génération, comme l’engouement autour des tueurs en série, et le rapport au paranormal en proposant un scénario inédit: se droguer par la possession, une méthode visiblement très addictive.

Un groupe d’amis acquiert le simulacre d’une main blanche ornée d’inscriptions faisant office de portail avec le monde des mânes, qui plus est ceux que nous ne souhaitons guère rencontrer. Les soirées où les vidéos des possessions qui s’y déroulent sont postées sur les réseaux sociaux se multiplient et attirent de plus en plus de curieux·ses. La seule règle à respecter? Ne pas tenir la main plus d’une minute trente.

Le film est on ne peut plus efficace quant à son rapport à l’horreur, passant du dégoût (certainement le sentiment dominant) au gore, sans pour autant finir en douche d’hémoglobine constante. Il est marquant par ses scènes les plus dérangeantes où l’on se sent profondément mal à l’aise, mais un malaise qui n’attise pas pour autant un sentiment de peur. Les mouvements de caméra et les angles de prises de vue choisis participent au côté immersif - parfois trop - en suivant les personnages telles les âmes qui s’y sont accrochées. Le suspense, pesant, est souligné par le travail sonore qui bruite sourdement la salle à différents endroits, renforçant ainsi son côté inquiétant - la bande originale n’en reste pas moins délectable. L’esthétique sombre et glauque est appréciable, mais potentiellement nuisible à un visionnement sur un écran d’ordinateur, au risque de ne rien y voir.

Autant cette œuvre déstabilise par ses qualités, ses défauts ne font pas entorse au genre: elle ne réactualise pas grand-chose, mais apporte, certes. Talk To Me (La Main) est une brise légère qui saura rafraîchir les derniers blockbusters d’horreur, et qui propose une réflexion sur les addictions et la curiosité mal placée qui attirent tant notre société. Mais, comme d’habitude, il s’agit d’un film d’horreur qui commence trop fort et qui peine à garder (ou même trouver?) son rythme, un yoyo constant entre temporalité et vitesse de découpage, qui ne laisse pas forcément le temps de souffler. Comme le récit ne nous mène pas forcément là où l’on s’y attend, il est difficile de trouver un moment de répit, même si certaines scènes peuvent être préméditées et/ou tournées au ridicule, et encore. Un peu cliché donc, mais pas mauvais pour autant, il s’agit d’un film d’horreur tout à fait recommandable en salle, surtout lors d’une séance tardive (nourriture cependant déconseillée durant le visionnage).