Delta

Thriller à l’italienne sélectionné l’année dernière à Locarno, Delta est une plongée anxiogène dans les profondeurs d’une région désertique.

Osso veille bénévolement sur une réserve naturelle dans le delta du Pô, au nord de l’Italie. Son quotidien bascule le jour où les habitants de cette région reculée, vivant principalement de la pêche, sont confrontés à une bande de braconniers, menés par Elia, un homme mutique et brutal. Lorsqu’un concours de circonstances amène ce voleur de poissons à tirer un coup de feu sur une petite frappe locale, une traque s’amorce, opposant ces deux hommes aux tempéraments opposés, mais tous deux hantés par leur passé.

En filmant une éreintante course-poursuite à travers le delta, le réalisateur Michele Vannucci parvient à capter l’ambiance singulière d’une région à la fois somptueuse et anxiogène, entre marécages, forêts décharnées et brume inquiétante. La traversée de ces paysages désertiques par des personnages silencieux et solitaires confère au film un air plaisant de western contemporain. Les conflits qui opposent les différents personnages se font également le reflet des problématiques propres à une région rarement représentée au cinéma, marquée par la pauvreté, la destruction d’une nature autrefois luxuriante et un certain racisme latent – les étrangers sont immédiatement accusés lorsque les braconnages sont commis.

Si l’on regrette quelques longueurs dans le rythme global et la présence de certains personnages (notamment féminins) stéréotypés, le film convainc dans l’ensemble par son articulation habile entre des éléments formels rappelant le documentaire – tournage en extérieur, caméra portée – et un récit ancré dans les codes du thriller, avec son lot de scènes d’action, un cocktail explosif souvent maîtrisé par les représentants du cinéma italien contemporain.