Carmen

Affiche Carmen
Réalisé par Benjamin Millepied
Titre original Carmen
Pays de production France, Australie
Année 2022
Durée
Musique Nicholas Britell
Genre Drame, Comédie musicale, Romance
Distributeur Pathé
Acteurs Rossy de Palma, Melissa Barrera, Paul Mescal, Nicole Da Silva
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 901

Critique

En tant qu’œuvre d’art totale, Carmen de Benjamin Millepied est un film qui convoque à la fois la danse, la musique, le chant et la poésie. Le chorégraphe franco-américain réinvente le célèbre opéra de Georges Bizet en proposant une comédie musicale urbaine et une vision contemporaine de la vie de la bohémienne sévillane. Contraint, hélas, par les règles du storytelling, la force artistique des intermèdes dansés se dissout dans un scénario manichéen et des dialogues peu percutants. 

 

À la suite de l’assassinat de sa mère Zilah (Marina Tamayo), perpétré par un cartel mexicain dans le désert de Chihuahua, Carmen (Melissa Barrera) fuit sa maison et tente de traverser la frontière afin de se réfugier à Los Angeles. Traquée par une patrouille frontalière, elle est sauvée par Aidan (Paul Mescal), soldat américain rentré d’Afghanistan, et membre de cette organisation de surveillance territoriale. En tuant un des gardes-frontières, il est forcé de s’échapper avec Carmen, devenant à son tour un hors-la-loi. S’engage une fuite en avant, sous forme de road movie, dans laquelle le couple, traqué par les forces de l’ordre, trouve finalement protection à La Sombra Poderosa, boîte de nuit tenue par Masilda (Rossy de Palma), la meilleure amie de Zilah.

Le premier long métrage de Benjamin Millepied se présente comme une mise en abyme d’une Gesamtkunstwerk wagnérienne. En effet, défini comme un art total par Ricciotto Canudo dans son Manifeste des sept arts (1911), le cinéma rassemble dans une seule configuration esthétique divers arts distincts. La comédie musicale étant, quant à elle, un genre cinématographique qui mêle le théâtre, la danse et le chant, Carmen est de ce fait une double synthèse des arts qui relate la vie d’une bohémienne hispanique. Initialement imaginée par l’écrivain Prosper Mérimée et transposée en opéra par Georges Bizet, la réinvention contemporaine de l’œuvre musicale de 1875 réside d’abord dans le changement géographique et le contexte historique du récit. Elle réside ensuite dans sa structure narrative qui oscille entre réalité, rêve et mysticisme, et dont la danse est un des agents d’expression principaux de ce drame. Fort de sa participation dans Black Swan (2010) de Daren Aronofsky, en tant que chorégraphe et partenaire de ballet de Natalie Portman, de son statut de disciple de Jerome Robbins (co-réalisateur de West Side Story, 1961) et de sa collaboration avec Nicholas Britell (compositeur primé de Moonlight, 2017) pour Carmen, Benjamin Millepied tente de nous offrir une interprétation résolument inédite. Tellement inédite toutefois, qu’elle n’a, comme points communs avec l’œuvre de Bizet, que le prénom et quelques textes de Henri Meilhac et Ludovic Halévy, intégrés dans les chœurs de la bande-son.

Bien que les intermèdes dansés reflètent une technique fluide et bien élaborée des mouvements au sein de l’espace profilmique, et dans lequel le corps de la caméra et les corps des acteurs se lient en relation simultanée, le talent artistique du chorégraphe-cinéaste se dissout dans des dialogues qui sonnent creux et un scénario manichéen. Les Mexicains sont en général les bons, et les Américains, les méchants, à l’exception d’Aidan. Malgré l’esthétique onirique et crépusculaire de Carmen, proche de la photographie de Gregory Crewdson, nous regrettons la puissance minimaliste de Hearts and Arrows (2015), court métrage qu’il avait créé avec sa compagnie de danse (L.A. Dance Project) et Philip Glass.


Kim Figuerola

Appréciations

Nom Notes
Kim Figuerola 14
Anthony Bekirov 4