Burning Days

Affiche Burning Days
Réalisé par Emin Alper
Titre original Kurak Günler
Pays de production Turquie, France, Allemagne
Année 2022
Durée
Genre Drame
Distributeur Trigon
Acteurs Selahattin Paşali, Ekin Koç, Erol Babaoglu, Erdem Şenocak, Selin Yeninci, Sinan Demirer
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 899

Critique

Après l’excellent A Tale Of Three Sisters qui nous plongeait dans des intrigues familiales au fin fond de la zone rurale turque de l’Anatolie, Emin Alper revient avec un thriller haletant qui se déroule, à nouveau, dans une petite bourgade perdue du pays.


Chaleur et inquiétude perlent sur le front d’Emre (Selahattin Paşali), nouveau procureur de la petite ville fictive de Yaniklar, perdue au milieu des collines sableuses d’Anatolie. Ici rien ne pousse à part la rumeur qui court aussi vite que le vent. Aux environs se dérobe un sol érodé, englouti çà et là par des dolines, conséquence de la surexploitation des nappes phréatiques dont la ville dépend pour son eau. Face aux difficultés de sa nouvelle juridiction, le jeune procureur décide de suivre son sens du devoir, inflexible, quitte à bousculer les traditions au même titre que les conventions politiques. Seulement Emre se heurte rapidement à la corruption locale, où les notables autour desquels circule l’intrigue de ce film se tiennent les uns les autres pour conserver leurs pouvoirs. Incarnés par des figures quasi génériques : un fils du maire arrogant (Erol Babaoglu) flanqué en permanence de son homme à tout faire (Erdem Şenocak), un journaliste de l’opposition intrusif aux mœurs quelque peu scandaleuses (Ekin Koç) ainsi qu’une juge bienveillante au comportement ambigu (Selin Yeninci) ; chacun campe sur l’ordre déjà établi au détriment de la ville. Quid du jeu politique attisé par la proximité d’une petite cité, où influencer l’opinion publique reste l’option la plus efficace pour détruire une réputation, une idée, ici en l’occurrence un jeune homme de loi aux idéaux beaucoup trop progressistes. L’intelligence de Burning Days réside certainement dans sa mise en forme balbutiante à l’image du protagoniste. On se laisse peu à peu dévoré par cette tension latente, présente en trame de chaque scène sans pouvoir deviner la suite de chaque action : nous sommes impuissants face à la situation, comme le procureur se laissant embourber dans un tissu de mensonges, perdant au fil des jours le sens de la réalité. Le réalisateur Turque Emin Alper a récemment déclaré dans la presse avoir conçu Burning Days comme une critique du système politique de son pays d’origine, connu pour être répressif et ultra-conservateur. Coup du sort, ce film fit scandale malgré lui en 2022, qualifié de propagande LGBT par le ministère de la Culture pour des scènes à tendance homoérotique, réclamant le remboursement des subventions allouées pour non-respect du scénario initialement présenté. Suite à ces fausses attaques diffusées dans la presse pro-gouvernementale, l’équipe du film a lancé un appel à l’aide provoquant un élan de solidarité à travers le pays, explosant le nombre d’entrées dans les cinémas d’Art & d’Essai. C’est sur un air engagé que nous saluons Burning Days pour son courage et sa force désabusée, rappelant avec amertume la grotesque mascarade à laquelle chacun d’entre nous prend part inconsciemment.

Sabrina Schwob

Appréciations

Nom Notes
Emilie Fradella 13
Anthony Bekirov 14