La Ligne

Affiche La Ligne
Réalisé par Ursula Meier
Titre original La Ligne
Pays de production SUISSE, FRANCE, BELGIQUE
Année 2022
Durée
Genre Drame
Acteurs Valeria Bruni Tedeschi, India Hair, Stéphanie Blanchoud
Age légal 12 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 892

Critique

Beaucoup de qualités dans ce nouveau film d’Ursula Meier. Une belle idée de départ qui donne son titre à ce long métrage, une histoire simple, mais forte et bien menée, des comédiens presque tous épatants, et l’excellent choix de situer son récit dans la région du Chablais, qui colle parfaitement à l’ambiance dépeinte. Avec La Ligne, la cinéaste franco-suisse réalise son meilleur film.

Spectaculaire et saisissante, filmée au ralenti, la scène d’ouverture place tout de suite au cœur du drame à venir. Une bagarre entre une mère et sa fille, un coup porté aux conséquences énormes pour tout le monde. Tous les personnages concernés devront ensuite vivre avec les suites de ce geste malheureux, pour l’assumer, le comprendre, le juger ou le pardonner. Margaret (Stéphanie Blanchoud), responsable de cet acte immédiatement regretté, se voit empêchée de s’approcher de sa mère et de la maison familiale. Cette mesure d’éloignement, cette fameuse ligne à ne pas franchir, permet à la cinéaste d’explorer les méandres de la famille, de l’amour, des regrets, du pardon, et des multiples frontières qui peuvent stupidement séparer les êtres. C’est un drame familial qu’Ursula Meier et Antoine Jaccoud nous proposent, un sujet déjà mille fois exploité au cinéma, mais qu’ils revisitent avec délicatesse, talent et, mine de rien, espoir.

On se demande au début quelles sont les raisons précises pour lesquelles Margaret est si démunie, si revancharde, si rancunière envers sa mère. On n’en sait finalement pas plus, mais le but du film n’est pas là, et il n’est pas besoin de connaître en détail le passé pour se sentir très concerné par le présent que le film nous propose. Ursula Meier prend son temps et insiste sur des moments qui peuvent paraître secondaires, mais qui touchent juste, comme un Noël passé sur le toit d’en face, la vente d’un piano, du Chopin sur un terrain vague ou la scène de clôture. Quant au Chablais, la région est réellement un personnage à part entière et reflète le cœur et les pensées des protagonistes; tantôt plat et apaisant, tantôt gris et envahi de brouillard, où l’on voit loin devant soi jusqu’à ce que l’horizon soit barré par les montagnes.

Les rôles principaux sont presque tous interprétés par d’excellentes actrices, Stéphanie Blanchoud et la toujours surprenante India Hair (vue dans Brèves de comptoir et Une intime conviction). Elles sont à la fois naturelles, justes et très expressives. Le problème vient de Valeria Bruni Tedeschi qui, contrairement à ses partenaires, est dans la fabrication. Elle joue d’une façon extrêmement théâtrale, exagère dans l’éthéré, surjoue la désorientation. Cela détonne et nuit à son personnage, par rapport à la sincérité et au naturel des autres comédiennes. Ursula Meier s’offre un joli casting pour ses personnages secondaires, comme le regretté Jean-François Stévenin dans son dernier rôle. Mais là aussi on ressent un bémol en voyant, dans le rôle d’un musicien, Benjamin Biolay, murmurant et lymphatique comme à son habitude, qui fait du remplissage.

Mais que ces quelques réserves ne vous dissuadent pas de soutenir ce film bien écrit, mis en scène avec tact et talent, qui offre de très beaux moments d’émotion. L’occasion au passage de saluer un scénariste brillant, prolixe et sensible, Antoine Jaccoud.

Philippe Thonney

Appréciations

Nom Notes
Philippe Thonney 15