Une comédie romantique

Une comédie romantique divertit sans vraiment faire rire. Quelques moments d’empathie avec les personnages (et au premier plan, César, incarné par le talentueux Alex Lutz), n’hanteront pas les souvenirs des spectateurs au sortir de la salle, ni les anthologies des scènes du comique français auxquelles, parfois, le film adresse un clin d’œil presque nostalgique.

- Il faut une autorisation pour jouer sur la voie publique Monsieur: Nom, prénom, adresse s’il vous plaît? - Romain Gary, 8, Impasse Emile-Ajar 3, Paris, XVIIIe.

Voici l’un des premiers échanges de répliques d’Une comédie romantique. Le trait fait un peu sourire; il sera sériel et, en réalité, partie liée avec l’intrigue du film; on se dit que c’est un peu fin, cet humour de la part de César, un bourgeois bohème de Montmartre désormais à la rue, un artiste qui n’a pas réussi (voir sa prestation sur la voie publique) car il est trop névrosé pour s’engager dans une vie rangée comme son frère (Olivier Chantreau) chez qui il est allé squatter pendant les vacances de ce dernier - qui reviendra prématurément. Car César ne fait pas oublier qu’il possède le capital symbolique de sa classe lui permettant, avec le spectateur flatté de connaître la référence, de bien (sou)rire des services de l’ordre incultes, qui n’y verront que du feu et n’ont, quant à eux, vraiment aucun capital. On sourit parce qu’en plus, Alex Lutz imite très bien la voix sucrée d’Alain Souchon, mais c’est un peu tout.

Ainsi, César refait surface auprès des siens après trois ans de fuite et de silence (prétextant une carrière musicale). Les siens ce sont surtout son frère et son ex Salomé (Golshifteh Farahani) qui, juste après sa fuite, a eu de lui une petite fille dès lors âgée… de 3 ans. Le film est donc une reconquête en équilibre funambulesque entre les attentes (bourgeoises) de ses proches et les mensonges qui les compensent: il s’agit du sel narratif de cette comédie. Inutile de préciser, qu’elle se termine bien; l’ensemble est même attendrissant, mais c’est un peu tout.

Le thème de la fraternité est certes habilement traité, le duo de frères fonctionne, d’autant plus que la vie sentimentale de celui dont le métier est de coordonner le remplissage de tableaux Excel (dixit) semble se résumer à des soirées de projection de Christian Clavier ou de Gérard Depardieu avec sa femme (Lucie Debay). Référence métanarrative qui est surtout un clin d’œil - plus qu’une trouvaille - un peu assourdissant, pour ne pas dire insupportable quand les personnages se mettent (peut-être sans le savoir) à imiter les hurlements de Clavier lors qu’ils s’engueulent parmi. Cet hommage au genre typiquement français a le mérite de situer cette comédie, peut-être plus piquante et nécessairement plus contemporaine, mais pas forcément, on l’aura compris, aussi drôle. À l’original, elle cherche délibérément à ne pas substituer de copie, ne reste alors qu’un substitut (qui reposerait presque sur le one-man-show non négligeable d’Alex Lutz). En bref, l’indéfini nomme très bien le titre de cette production, et ceux qui aiment les comédies romantiques en général, trouveront dans Une comédie romantique, un moment de divertissement qui donnerait presque envie de revoir Les Visiteurs comme le film l’y invite.

Jonas Pont