Ariel

Affiche Ariel
Réalisé par Aki Kaurismäki
Titre original Ariel
Pays de production Finlande
Année 1988
Durée
Musique Dmitri Shostakovich, Piotr Tchaïkovsky
Genre Comédie dramatique
Acteurs Matti Pellonpää, Turo Pajala, Susanna Haavisto, Eetu Hilkamoriku, Erkki Pajala
Age légal 14 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 866

Critique

Ce film est le deuxième de la «Trilogie du prolétariat» que le cinéaste consacre à la classe ouvrière finlandaise. Vision toutefois moins sombre qu’il n’y paraît, l’humour et la ténacité étant toujours présents.

Aki Karismäki a réalisé plusieurs trilogies, dont la dernière, sur les migrants (Le Havre, 2011 et L’Autre Côté de l’espoir, 2017), est restée inachevée après ses adieux au cinéma en 2017. Celle qu’il a consacrée au prolétariat est sa première. Ombres au paradis en 1986, Ariel en 1988 et La Fille aux allumettes en 1990 s’inspirent tous de la classe ouvrière et de ses souffrances dans une Finlande marquée par une récession sévère et un taux de chômage de 15%.

La Finlande est alors coincée entre la Laponie suédoise ou les neiges du Grand Nord, et, sur toute sa frontière est et sud, par le «continent» soviétique. C’est une situation qui incite à la fuite. Que le travail vienne à manquer, que la pauvreté s’aggrave et le rêve d’un ailleurs se fait lancinant.

Ariel, le titre de ce film, est un archange dans la Bible. On lui attribue la lumière dont il aurait été le porteur après la chute d’un autre archange, Lucifer, devenu Satan. Voilà un symbole intéressant pour comprendre le propos du réalisateur. Mais on n’en saura pas davantage car le sens de ce titre est, de fait, la conclusion de l’histoire.

Et l’histoire est celle de Taisto (Turo Pajala), mineur comme la majorité des hommes du Nord finlandais. Or, sa mine ferme, les ouvriers sont priés d’aller voir ailleurs. Et ailleurs, c’est le sud du pays, dit à Taisto un homme plus âgé, son père, peut-être, qui lui lègue son superbe cabriolet avant de se suicider. Toutefois, rouler dans une belle américaine ne veut pas dire avoir gagné son destin; pour preuve, la capote du véhicule ne se ferme pas, alors qu’il neige et qu’il vente.

Kaurismäki pousse son personnage à résister, à lutter, à ne jamais abandonner. Ce ne sera pas facile car, presque caricaturalement, Taisto tombe dans tous les traquenards. Il est un homme courageux et droit, mais tout se ligue contre lui, il n’y a pas de cadeau à faire chez ces pauvres-là; ici, même la justice s’attaque aux victimes. Cependant, il y a Irmeli (Susanna Haavisto) et Mikkonen (Matti Pellonpää) dont les sentiments sont fortement liés au désir d’une vie meilleure.

Le réalisateur finlandais construit des personnages que la pauvreté endémique devrait jeter dans le fatalisme. Au contraire, ils sont avides d’utiliser les rares opportunités pour se donner un objectif. Leur courage est irrépressible, rien dans le cynisme ambiant ne les empêche de repartir. Il y a dans Ariel une sorte de souffle qui force à lutter contre le désespoir, à s’accrocher envers et contre tout. C’est moins l’action qui compte que l’évolution des caractères prêts à s’adapter pour gagner le soleil.

La mise en scène est exemplaire de retenue. En quelques plans, la situation économique du pays est brossée et dessiné l’avenir des personnages. Avec sa singularité de ton, la frugalité de ses dialogues, son sens des couleurs froides, le cinéaste fait parler le cinéma et rien que le cinéma. Ce qu’il a à dire, il le dit par l’image sans s’égarer dans l’anecdotisme. C’est bien trop de talent pour que les cinéphiles acceptent sans regret sa décision de ne plus filmer.

Geneviève Praplan

Appréciations

Nom Notes
Geneviève Praplan 18