Biggie: I Got a Story to Tell

Affiche Biggie: I Got a Story to Tell
Réalisé par Emmett Malloy
Titre original Biggie: I Got a Story to Tell
Pays de production U.S.A.
Année 2021
Durée
Musique Adam Peters
Genre Documentaire
Distributeur Netflix
Acteurs The Notorious B.I.G., Sean Combs, Faith Evans
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 853

Critique

Ce documentaire au dispositif décevant - on s’y contente d’osciller entre témoignages et images d’archives amatrices - manque le rendez-vous tant attendu. Nos espoirs d’enfin découvrir un hommage à la hauteur du génie qu’était Biggie Smalls, légende du rap américain, resteront malheureusement inassouvis.

Lorsque l’on raconte un roi - et ce geste se confirme largement au cinéma -, on narre en réalité souvent sa chute (pensons canoniquement à Scarface). Un tel choix peut se défendre, même très bien. Tout d’abord, car la chute est décharge. Elle est ce moment - nous pourrions dire mouvement - qui succède à l’acmé, au chargement. Elle marque à ce titre le point fragile de l’effondrement, celui du château qui s’écroule et des cartes qui s’envolent. Autrement dit, la chute est par définition une double promesse: celle d’une lente construction balayée par sa sœur siamoise, la destruction, aux coups brusques et chirurgicaux. On comprend alors l’intérêt de la porter à l’écran: elle est drame, toujours. Et Biggie: I Got A Story To Tell, documentaire sur Christopher Wallace, alias The Notorious B.I.G., légende du rap américain, ne déroge pas à la règle: de son enfance à sa mort prématurée (24 ans), le long métrage fait le pari ambitieux de retracer la généalogie d’un empire.

Sauf que dans ce film, la chute, et ce n’est pas forcément une mauvaise chose, a ceci de particulier qu’elle est partiellement désamorcée: en commençant par la fin tragique du rappeur (sa mort est évoquée - non traitée! - dès les premières images), tout le reste est condamné d’avance - mais c’est là que réside la singularité, sinon la force, du métrage. En effet, une telle ouverture possède a minima le double mérite de l’honnêteté - le film évite ainsi de se bâtir sur un faux suspense qui jouerait de la mort de l’artiste - et de l’originalité – le documentaire, contrairement à ses nombreux prédécesseurs, prend le parti de revenir davantage sur la vie de Biggie que sur sa mort énigmatique. Mais une fois que cela a été dit, il devient difficile de défendre cet énième hommage au King Of New York (quelle ironie, le film de Ferrara était l’un de ses préférés), tant celui-ci est constamment en rattrapé par sa démesure, son ambition dévorante. Plus exactement, faire le choix de traverser autant d’événements significatifs de sa trop brève carrière en un temps aussi réduit rend l’ensemble oubliable, quasiment désincarné.

On touche donc ici de près au problème majeur qui structure ce documentaire: il prend la forme d’une flèche, à la vitesse foudroyante, qui déchire le temps et s’écrase sur sa cible sans que nous l’ayons vue passer. Comme la flèche, le documentaire défile, traverse tous les sujets sans jamais s’arrêter, sans jamais les traiter (son enfance difficile sans père, son éducation dans une école catholique, sa jeunesse dans la misère de Brooklyn, ses voyages en Jamaïque, ses débuts en tant que dealer, ses rencontres avec son producteur P. Diddy, sa relation attraction-répulsion avec Tupac, la naissance de sa fille… tout cela en 1 h 30, et j’en passe beaucoup sous silence). Mais, au final, le plus regrettable, c’est sans hésiter la maigreur du contenu musical (séquences en studio, images de ses performances, bande originale minimaliste) qui ne permet pas aux spectateurs de saisir l’aura et le charisme de cet homme à l’allure d’ours mais au flow si mélodieux. Qui ne permet pas de cerner sa singularité au sein d’une scène aussi vivante et novatrice que celle de New York dans les années 80 et 90. Mais en réfléchissant, il se peut en réalité qu’il se soit lui-même construit son plus bel hommage: écrire Ready to Die afin de célébrer sa vie.


Kevin Pereira

Appréciations

Nom Notes
Kevin Pereira 9