Petite maman

Présenté lors de la 71e Berlinale, Petite Maman est le nouveau long métrage de Céline Sciamma. Une relation mère-fille pas comme les autres, tout en douceur et simplicité.

Nelly a 8 ans, elle passe d’une chambre à l’autre pour dire au revoir aux résidentes de la maison de retraite où elle se trouve. Arrivée dans la dernière pièce, le lit est vide, les tableaux sont en train d’être décrochés du mur, les meubles déménagés. Autant d’adieux comme une infime compensation à celui qui n’a pas suffisamment été dit. L’enfant a perdu sa grand-mère. Au deuil familial vient s’ajouter la charge logistique obligeant Marion, la mère de Nelly, à retourner dans la maison de son enfance pour la vider. Le vide, Marion le ressent et, envahit par la tristesse, décide de s’en aller, laissant sa fille et son mari débarrasser la maison remplie de souvenirs. Parmi eux, un vieux jokari, un jeu «pour jouer toute seule» conclut Nelly aux explications de son père. Seule, l’enfant ne le restera pas longtemps. L’élastique de son nouveau passe-temps rompu, Nelly rencontre une fille de son âge qui, à l’instar de sa mère, construit une cabane dans les bois et se prénomme… Marion.

Alors que les deux petites filles (interprétées par les sœurs jumelles Joséphine et Gabrielle Sanz) se lient d’amitié, le film ne tente pas de jouer la carte de l’ambiguïté: Marion est bel et bien la version enfant de la mère de Nelly, sa «petite maman». Les scènes suivantes le confirment. La maison de la grand-mère de Nelly est en tout point similaire à celle où vit Marion, la mère de cette dernière marche déjà avec une canne et porte le nom de l’aïeule décédée. Également, la petite Marion est à quelques jours de se faire opérer, tout comme la mère de Nelly l’avait été au même âge. Laissant tout doute de côté, le charme de l’œuvre de Céline Sciamma réside dans la simplicité des faits, aussi déroutants soient-il. Ainsi, Nelly passe du temps avec la mère de sa nouvelle amie à faire des mots fléchés, activité, on le devine, qu’elle pratiquait avec sa grand-mère. Les allers et retours entre les deux maisons des enfants sont autant de voyages dans le temps où Nelly profite d’un temps révolu qu’elle n’est pas censée vivre. Le retour de Marion adulte signera la fin de cette parenthèse enchantée pour Nelly.

Après le splendide Portrait de la jeune fille en feu, Céline Sciamma réalise un film plus intimiste et onirique. Seul regret: le long métrage est parti bredouille de la dernière Berlinale où il était en lice pour l’Ours d’or, ce qui ne nous empêche pas de l’aimer follement.