Baghdad In My Shadow

Affiche Baghdad In My Shadow
Réalisé par Samir, Furat Al-Jamil
Pays de production Suisse, Allemagne, Royaume-Uni
Année 2019
Durée
Musique Tom Linden, Walter Mair
Genre Drame
Distributeur Filmcoopi
Acteurs Haytham Abdulrazaq, Zahraa Ghandour, Waseem Abbas
Age légal 14 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 829

Critique

Se souvenir de ses origines, d’un pays qu’on aime toujours, rappeler les contradictions que cela implique, voilà ce qui compose ce douloureux film sur l’exil. Mais il y est aussi question de choix et l’on se demande: ce choix n’est-il pas le sujet le plus important?

Samir a quitté l’Irak à l’âge de 11 ans pour assurer son avenir en Suisse. Il est devenu un cinéaste engagé, avec, dans son ombre, son pays natal, ainsi que le confirme le titre de son nouveau long métrage. Il filme à Londres une petite communauté d’Irakiens immigrés qui se croisent dans un café de quartier, en butte là aussi à la menace extrémiste. Le poète Taufiq (Haytham Abdulrazaq), communiste et athée, y vient écrire. Autour de lui gravitent des compatriotes marqués par leur condition. Comme Amal (Zahraa Ghandour), jeune femme qui a fui Bagdad et changé d’identité et de religion pour échapper à l’emprise de son mari. Ou Muhanad (Waseem Abbas), homosexuel à qui les clients du café donnent du travail.
L’inspiration du réalisateur est livrée par le générique. La caméra effectue un long mouvement et vient poser son œil dans la cour d’une prison; quelques plans rapides laissent entrevoir un régime de terreur. Le portrait de Saddam Hussein est accroché à proximité. En contrepoint, se glissent de superbes détails de reliefs assyriens. Ce pays fut une grande civilisation… Qu’en reste-t-il aujourd’hui?

Retour en Europe. Les protagonistes de Baghdad In My Shadow ne sont pas des êtres simples; ils ont beau vivre à Londres, leur origine les emprisonne de toutes ses contraintes, de ses règlements abrupts, de sa tyrannie d’autant plus destructrice qu’elle s’unit désormais à la radicalisation de l’islam. L’angoisse colle à ceux qui ont fui, elle emprisonne partout la liberté de vivre et de parler: censure et autocensure. Le film le fait ressentir âprement.
En revanche, avoir pris le parti de tout dire - la condition féminine, l’homosexualité, l’extrémisme religieux, la corruption… - conduit à des coïncidences parfois peu crédibles, une impression de trop-plein parce que tous les problèmes se trouvent assemblés justement là, dans ce petit groupe d’amis, dans ce petit coin de Londres.

Plutôt qu’un récit linéaire, Samir a opté pour une démarche plus inventive; dans les premiers plans, il montre Taufiq convoqué à un commissariat. C’est à travers l’interrogatoire de police qu’émerge, bribe par bribe, l’histoire des différents protagonistes. Il en résulte un montage habile, mais aussi un scénario difficile à suivre au début. Le sens du récit se précise au fil des séquences et à la fin, tout s’éclaire lorsque le récit se termine sur le choix de Taufiq. On se demande alors s’il n’aurait pas été plus important de développer ce choix et ses enjeux pour le futur, plutôt que d’en évoquer les causes figées dans le passé.

Mais c’est ce qu’a voulu Samir, sans doute parce que pèse toujours sur lui le poids ambigu d’un pays, le sien, constamment bouleversé par la tragédie.

Geneviève Praplan

Appréciations

Nom Notes
Geneviève Praplan 15
Georges Blanc 17