Rojo

Affiche Rojo
Réalisé par Benjamín Naishtat
Titre original Rojo
Pays de production Argentine, Brésil, France, Allemagne, Pays-Bas
Année 2018
Durée
Musique Vincent van Warmerdam
Genre Thriller, Drame
Distributeur Filmcoopi
Acteurs Dario Grandinetti, Alfredo Castro, Andrea Frigerio, Laura Grandinetti, Diego Cremonesi, Susana Pampin
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 816
Bande annonce (Allociné)

Critique

Dans l’Argentine de 1975, Claudio (Dario Grandinetti), avocat réputé, provoque un esclandre dans un restaurant lors d’un échange avec un inconnu (Diego Cremonesi). Plus tard, alors que Claudio et sa femme (Andrea Frigerio) quittent l’établissement, les deux hommes se livrent à un combat soldé par le suicide raté de l’inconnu, que l’avocat laissera périr, sans assistance, dans le désert. Ce crime est la première étape d’une spirale infernale dans laquelle se fait happer Claudio.

L’élément le plus marquant de ce Rojo est son contraste entre la dimension visuelle très réussie, parfois superbe, et le profond sentiment de malaise qu’il dégage, à l’instar de la scène montrant Claudio abandonner son adversaire à l’agonie, râlant et gémissant, avec en fond un magnifique lever de soleil très poétique. Cela donnera le ton du film, où la violence est omniprésente et n’épargne personne, ni les animaux, ni les jeunes, ni les adultes. Elle peut également prendre une forme plus psychologique en se muant en insidieuse tromperie, ce à quoi Claudio s’adonne sans scrupules. Et, tel que le remarque une mère désespérée par la disparition de son fils, personne ne fait rien. Or, ainsi que le clame l’affiche du film, ne rien dire, fermer les yeux, c’est déjà un crime, tout comme laisser mourir un «suicidé» est considéré comme un meurtre.

En effet, le rouge du titre symbolise celui du sang, que les protagonistes regardent couler sans sourciller tant que cela leur profite. Cette idée est d’ailleurs exprimée dans une séquence entre Paula (Laura Grandinetti), la fille de Claudio, et son petit ami Santiago (Rafael Federman): ce dernier désire lui faire l’amour mais elle, visiblement mal à l’aise, lui signale qu’elle a ses règles et que ces pertes menstruelles risqueraient de lui déplaire, ce à quoi il répond par la négative. Profiter de la faiblesse ou de l’innocence ne paraît gêner personne dans Rojo.

Le film est traversé par des allusions politiques renvoyant à la situation argentine trouble et tendue: l’inconnu du début traite les clients du restaurant de nazis, un préfet local fait des arrangements qu’on suppose frauduleux avec des Américains du Nord, on apprend que certains partis seront censurés, que des personnes fuient ou «disparaissent» et la dernière réplique parle d’un coup d’état qui se fomente… Cela participe à instaurer un climat de tension, mais n’influe pas directement sur l’intrigue principale concernant Claudio, ce qui aurait pu pourtant lui conférer davantage de profondeur et d’originalité. Le postulat politique de la réalisation est bien résumé dans la scène de l’éclipse, qui se teinte également de rouge, et symbolise le fait que les protagonistes se voilent la face et refusent de tenir compte de la situation sociale et politique dans laquelle ils se trouvent. Rojo est donc un film fort mais qui se perd un peu parfois, toutes les pistes n’étant pas abouties.


Amandine Gachnang

Appréciations

Nom Notes
Amandine Gachnang 14