Los Fantasmas Del Caribe

Affiche Los Fantasmas Del Caribe
Pays de production Suisse, France, Colombie
Année 2018
Durée
Genre Documentaire
Distributeur Adok films
Acteurs Felipe Monroy
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 802

Critique

Comment vit-on dans un état de guerre chronique? Le réalisateur colombien choisit le cinéma pour accomplir un difficile travail de mémoire.

La Colombie est rongée depuis des décennies par une violence incessante. À côté des factions de guérilleros marxistes, auxquels ont répondu des groupes paramilitaires, a fleuri la guerre des narcotrafiquants. Combats et attentats ont écrasé tout espoir de vie normale. À côté des 45’000 disparus, le conflit a tué 260’000 personnes et poussé quelque 6 millions d’autres à l’exil.

 Felipe Monroy se trouve parmi ces derniers. Lorsqu’il revient au pays, en 2016, les négociations de paix entre les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) et le gouvernement sont en cours et divisent la population. Jusque dans la famille du cinéaste. Mais quelle famille? N’est-elle qu’une victime de la guerre ou est-elle aussi celle d’un tissu social larvé par la férocité du trafic de drogue?

Felipe Monroy laisse parler les siens: son père Jorge, sa mère Victoria et sa sœur Adriana. «J’ai voulu à travers ce film dire à la fois le présent de ma famille et les souvenirs de mon enfance, ceux qui me reviennent et ceux de mes proches. C’est une tentative d’exploration mais aussi de reconstruction de la mémoire. La mienne, la leur et celle du pays.» Comment a-t-on vécu, grandi dans une ville où tous les jours explosaient des voitures piégées? Comment être un père, une mère, un frère, une sœur ou une famille dans de telles circonstances? Comment ce passé, son évocation ou son oubli affectent-ils la vie intime des protagonistes, leur vie familiale, leur vie sociale, celle de leurs proches ou de leurs contemporains?

 La mise en scène du documentaire prend le parti de l’intimité, facilitée par le fait que le cinéaste est chez lui; sa caméra ne vole pas les images, ce sont les siennes. Ainsi le passé et les questions qu’il impose sont tout naturellement partagés. Felipe Monroy se filme lui-même dans le milieu qui fut le sien. Le voici parlant de son père à sa mère, de sa mère à son père, de ses parents à sa sœur; et chacun d’éveiller des morceaux d’autrefois, de les réajuster à la mesure des autres récits.

 Par la force des ravages subis par la famille qui se reconstruit à l’écran, apparaissent aussi ceux qui ont déchiré le pays. Ce qui est arrivé aux Monroy se multiplie par le nombre d’habitants à l’existence dévastée, par celui des quartiers détruits. Cependant, le plus désespérant est le climat de misère qui hante la ville. Cette ambiance émane en partie des manifestations d’évangélistes qui rassemblent les foules. Les églises érodent le sens des responsabilités des participants aux profits d’un «Jésus» qui guérira tous leurs maux, une fois venu le temps… du Jugement dernier. Il suffit d’attendre!


Geneviève Praplan

Appréciations

Nom Notes
Geneviève Praplan 15