Etage du dessous (L')

Montant l’escalier de son immeuble, Patrascu (Teodor Corban) entend les termes d’une violente dispute amoureuse derrière une porte et voit l’un de ses voisins sortir de l’appartement. Il n’intervient pas. Quelques heures plus tard, la police est dans les lieux; le corps d’une jeune femme vient d’être découvert. Patrascu ne dit rien de ce qu’il a surpris. La vie continue comme avant, mais en apparence seulement.

Radu Muntean a lu ce fait divers dans les journaux; dans L’étage du dessous, il se demande comment une personne peut ne pas intervenir lors d’une dispute, au risque de laisser survenir le pire. Ce qui l’intéresse n’est pas de juger Patrascu, mais de faire en sorte que le spectateur s’identifie à lui jusqu’à s’interroger sur sa propre réaction dans un cas similaire.

Cette identification fonctionne par la banalité du quotidien mis en scène. Il n’y a pas d’exploit ici, ni de spectacle, ni de vedettes. C’est une famille ordinaire, vaquant à ses activités, entretenant ses relations. Mais dans les gestes inchangés de chaque jour, une tension s’est installée qui augmente sans cesse. C’est la force du film que de construire les sentiments d’angoisse et de regret sans jamais bousculer la routine. Et c’est le talent de Teodor Corban que de parvenir à y faire croire.

Film qui dit ce qu’il ne montre pas, L’étage du dessous, n’est pourtant pas toujours facile à déchiffrer. Le cinéaste rappelle le propos - les remords de P?tra?cu - notamment en filmant un immeuble sans ascenseur, obligeant son protagoniste à passer chaque jour devant l’appartement sous scellés. Mais le silence infaillible de l’intéressé déplace parfois le propos au point de faire douter du nom du coupable. Et lorsqu’apparaît le générique de fin, les soupçons ne se sont forcément pas éclaircis.