Kaili Blues

Affiche Kaili Blues
Réalisé par Bi Gan
Pays de production Chine
Année 2015
Durée
Musique Giong Lim
Genre Drame
Distributeur Cinéma Bellevaux
Acteurs Feiyang Luo, Lixun Xie, Yongzhong Chen, Daqing Zhao, Shuai Zeng
N° cinéfeuilles 746
Bande annonce (Allociné)

Critique

Prix du Meilleur Premier Film à Locarno (2015) et Grand Prix duFestival des 3 Continents, Kaili Blues n’a pas séduit les grands distributeurs. Le premier film du jeune réalisateur chinois Bi Gan est beau et surprenant à la fois ; il ne convaincra peut-être pas chacun, mais possède un réel pouvoir de séduction et une indéniableoriginalité.

Secondé dans sa tâche par une doctoresse d’un certain âge, Chen estmédecin dans une ville provinciale du sud de la Chine. Il a perdu safemme pendant une période où il a été lui-même emprisonné pour avoirappartenu à une société secrète déclarée hors la loi par le régime.

Aujourd’hui il s’occupe de son jeune neveu Weiwei, qu’il aimerait adopter pour lui donner une éducation qu’est loin de lui apporter sonpère, un homme inconstant et joueur. Lorsqu’il apprend que ce dernier a vendu Weiwei, il décide de partir à sa recherche. Lors de ce voyage, il va traverser un étrange village, Dangmai, où les heures semblent échapper aux règles du temps. C’est là qu’il va retrouver les fantômesde son passé et des images de son futur. Mais ce monde bizarre danslequel il doit s’intégrer n’est-il pas le produit de sa mémoire ou de son imagination? Disons-le tout de suite, Kaili Blues est un film déroutant et énigmatique, une histoire complexe qui, plutôt que de tenter de clarifier certains mystères, prend plaisir à déboucher sans cesse sur de nouvelles interrogations. Il n’y a guère de continuité linéaire dans ce long métrage où certaines séquences intercalées semblent appartenir au présent de la narration, alors qu’elles se révèlerontpar la suite être des flash-back. Et quand on se croit bien installé dans le passé, des incertitudes apparaissent… La frontière entre vie et mémoire est constamment brouillée, et des rêves s’affichent comme l’expression de la réalité. Les personnages échappent ainsi à touteidentification précise et pourraient presque être interchangeables.
Le morceau de bravoure de Kaili Blues - à la fois discutable etremarquable - consiste en un long plan séquence de 40 minutes, filmé en steadycam : le réalisateur met en place un parcours circulaire dansles rues et les boutiques du village de Dangmai, en suivant alternativement plusieurs personnages (une couturière qui traverse la rivière en bateau, un jeune homme qui semble être un Weiwei âgé, une coiffeuse, un groupe pop composé de jeunes musiciens qui jouent assez mal, etc.). Cette longue séquence dilate (ou compresse) le temps dans un même mouvement, tout en transformant les personnages. Une opération originale, mais en même temps dérangeante parce que le réel des scènes décrites apparaît trop fabriqué et parce que le spectateur ne peut pas toujours reconstituer (les images défilent vite !) les divers événements évoqués précédemment - et en désordre - par les différents protagonistes.

Le cinéaste Bi Gan ne manque certes pas de talent. Kaili Blues est un film fluide, surprenant, qui dénote une inspiration poétique évidente. La mise en scène est parfaite, les événements, qu’ils soient réels ou rêvés, s’accompagnent d’un commentaire intérieur poétique et surréaliste, sorte de discours dépaysant et familier à la fois. Bi Gan, jeune réalisateur de 27 ans, est un représentant du cinéma chinois indépendant, et l’on découvre avec lui des lieux où le cinémaofficiel de son pays ne conviera sans doute pas le spectateur… Unebonne raison de se plonger dans cette aventure cinématographique originale.

Antoine Rochat

Appréciations

Nom Notes
Antoine Rochat 15