Jeux d'été

Affiche Jeux d'été

Critique

Ce sont des vacances banales: un terrain de camping dans les pinèdes qui bordent la plage. Nic (Armando Condolucci), son petit frère (Marco D’Orazi) et leur père (Antonio Merone) dressent leur tente et s’installent. Le grand garçon est morose, il rencontre des jeunes de son âge et se dispute avec eux. Tout ira mieux, peut-être, lorsque sa mère arrivera. Mais non, les parents se disputent et leurs deux fils trompent leur malaise en jouant avec leurs copains à des jeux dangereux. Avec eux, Marie (Fiorella Campanella) souffre elle aussi à cause de sa mère.

D’origine italienne, Rolando Colla (1957) est né à Schaffhouse et considéré comme un cinéaste suisse. Diplômé en histoire de l’art, il a commencé une carrière d’acteur et de scénariste, puis a tourné des courts et longs métrages qui lui ont valu plusieurs prix. JEUX D’ETE a été projeté à la dernière Mostra de Venise. Il représentera la Suisse aux Oscars 2012.

«Le film repose sur un certain nombre d’oppositions binaires qui, selon moi, sont essentielles pour lui donner une portée universelle: l’opposition entre le monde des enfants et celui des adultes, entre le nécessaire et le contingent, entre l’ombre et la lumière, entre l’amour et la violence. Dans ce cadre-là, le film raconte la destinée de gens simples et ordinaires», explique le réalisateur.

Des gens simples, qui voient s’effondrer leurs rêves nourris par les magazines; comme le père de Nic qui «serait devenu chanteur, si...»... L’amour qui fuit avec ce que cela entraîne de culpabilité. L’observation crue, par les enfants, du désastre conjugal. Et l’espoir reproduit génération après génération d’une vie idéale... Cela rendu par une mise en scène sobre et des dialogues synthétiques. Le jeu des acteurs donne l’essentiel.

Parce qu’il montre les interactions familiales, la façon dont le modèle parental marque les enfants, comment ceux-ci reçoivent et répercutent ce qu’ils voient chez les adultes, JEUX D’ETE est beaucoup plus qu’une histoire d’amour. Il tend soigneusement les liens entre les personnages et excelle à distinguer la singularité de chaque caractère, de chaque âge. Pas de jugement; le regard est délicat, sensible et fortement empathique à l’égard de tous les protagonistes, car le geste faux est induit par une frustration qu’il faut aussi expliciter. Pas de mélodrame, la souffrance peut s’exprimer par bien d’autres outils que les larmes; voir Nic, qui affirme à ses copains être insensible à la douleur.

Rolando Colla dit avoir vécu des situations similaires quand il était jeune garçon. En tout cas, il donne le point de vue des enfants. Son analyse est si juste et sa peinture si équilibrée, que le spectateur croit assister, impuissant, à des tourments réellement vécus. Mais n’est-ce pas le lot quotidien de tant de familles?

Note: 15

Geneviève Praplan