Héritiers (Les)

Affiche Héritiers (Les)
Réalisé par Stefan Ruzowitzky
Pays de production Autriche
Année 1998
Durée
Genre Drame
Acteurs Lars Rudolph, Simon Schwarz, Sophie Rois, Julia Gschnitzer, Ulrich Wildgruber
Age légal 12 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 377
Bande annonce (Allociné)

Critique

Le cinéma autrichien, peu connu chez nous, ne manque pourtant pas d'intérêt. Volontiers assez glauque, il propose ici une sorte de western alpin. Dans le monde rural de l'entre-deux-guerres, sept domestiques (hommes et femmes) héritent de la ferme et des terres de leur maître, au grand dam des riches propriétaires environnants.

Ruzowitzky, historien et homme de théâtre né en 1961, a commencé par réaliser notamment des documentaires pour la télévision. Il porte un regard aigu sur un monde pas si révolu que cela, aidé par les souvenirs des figurants locaux. LES HERITIERS gagnent de ce fait une portée intemporelle, un peu à la manière des PETITES FUGUES de Yersin, en plus tragique.

Les sept domestiques, magnifiquement incarnés par d'excellents comédiens (Simon Schwarz a d'ailleurs remporté le prix du meilleur comédien au Festival de Saarbrücken 1998), présentent une ébouriffante galerie de portraits, campant des personnages qui, peu à peu, prennent conscience de leurs droits et de leur dignité face à une classe possédante arrogante. Ils soutiennent un efficace plaidoyer contre l'hypocrisie et l'égoïsme: à l'instar des femmes dont les couleurs vives, estompées par un badigeaon grisâtre, sont mises au jour par les travaux de restauration, ils laissent apparaître leurs tons authentiques, tranchant sur le vernis des convenances. Ainsi, ils n'hésiteront pas à héberger des artistes de cirque - vision surréaliste d'un éléphant dans une cour de ferme...

Un tel anticonformisme a-t-il des chances de durer? Le film, mélange de Gotthelf, Capek, Brecht, Fellini et autres, apporte une conclusion digne d'une tragédie antique. Probablement tourné en vidéo légère puis gonflé en 35 mm, il entraîne le spectateur au coeur d'un drame saisissant. A noter l'utilisation judicieuse de musiques bien choisies, en particulier d'oeuvres de Satie. Il ne reste qu'à souhaiter bon vent à une oeuvre qui le mérite: que la programmation lui soit favorable!

Daniel Grivel