Critique
La cinéaste belge à la filmographie enviable propose ici une fiction qui aurait pu être un documentaire, n'était sa crainte de craquer devant des images trop prenantes. Elle s'est donc inspirée du roman Chamelle de Marc Durin-Valois et nous présente une Afrique symbolique, faite de nos représentations élémentaires: sécheresse, disette, guérilla, corruption, etc.
Le prélude du film est fort: dans une famille comprenant deux garçons, une fille est venue au monde. Un sage du village conseille au père d'étouffer cette bouche inutile; la mère se cache alors et revient lorsque le moment favorable est passé. La fillette, Shasha (craquante Asma Nouman Aden), jouera un rôle-clé dans le récit.
Le père (Issaka Sawadogo) décide de migrer vers la région des lacs; une autre famille se joint à la caravane. La route est difficile et semée d'embûches, les points d'eau sont rares. Le fils aîné, rançonné par des rebelles, sera enrôlé comme enfant-soldat; le cadet sera abattu, gratuitement, par d'autres rebelles ayant obligé la petite sœur à traverser un champ de mines afin de s'assurer le passage de leurs véhicules. La mère (Carole Karemera), souffrant d'une hémorragie, ne peut plus poursuivre la piste.
Esthétiquement, le film est magnifique: très beaux acteurs, costumes superbes, paysages fascinants. Trop beau et aseptisé. Sans plaider en faveur d'un discours misérabiliste, on se dit qu'une évocation plus terre à terre aurait été plus efficace qu'une narration édifiante rappelant les histoires d'école du dimanche gorillées par Mark Twain.
Daniel Grivel
