The Giant Buddhas

Affiche The Giant Buddhas
Réalisé par Christian Frei
Pays de production Suisse
Année 2005
Genre Documentaire
Acteurs Taysir Alony, Xuanzang
N° cinéfeuilles 520

Critique

"Six mois avant le bouleversement international suscité par les attentats du 11 septembre 2001, la communauté internationale s'était laissé aller à un éclat de voix. Cela faisait plus de vingt ans que l'Afghanistan était dépecé. L'occupation soviétique, puis la guerre civile et enfin l'arrivée au pouvoir des talibans, tant de souffrances accumulées et de destructions n'avaient guère attiré de compassion. Mais là, c'en était trop. Les talibans venaient de faire exploser deux statues géantes de Bouddhas, sur le site historique de Bamiyan. Inadmissible, vraiment.

""Je suis maintenant convaincu que ces statues n'ont pas été détruites. Elles se sont effritées de honte. A cause de l'ignorance en Occident, de l'Afghanistan."" Ces propos du cinéaste iranien servent d'exergue au superbe documentaire de Christian Frei. Le point de départ du film est la destruction de ces monuments, témoins d'une culture séculaire, épanouie le long de la route de la soie. Le tournage se déplace sur l'itinéraire des caravanes et soulève les courants d'influences qu'elles transportaient avec elles.

Le réalisateur suisse Christian Frei et le cameraman Peter Indergand filment à Bamiyan surtout, mais aussi en Chine, puis à l'Ecole polytechnique de Zurich et à l'Unesco à Paris où le destin des statues pourrait se jouer. Ils rencontrent des personnes liées pour des raisons très différentes à la destruction des monuments. Pourtant, malgré leur profonde implication dans ce magnifique travail, dans ces images splendides, dans ce sens de l'écoute, ils parviennent à garder la distance entre le fait et le commentaire au profit d'une œuvre étonnante d'objectivité.

Le spectateur se retrouve sur le fil qui sépare les cultures, tantôt d'un côté, tantôt de l'autre, appelé à entendre tous les points de vue. Les bouddhas géants se présentent à lui bien plus comme une réflexion méditative, que comme un documentaire. ""Je considère mon film comme un hymne au pluralisme des opinions, des religions et des cultures, explique Christian Frei. Personne ne doit imposer homogénéité et standardisation au reste du monde, ni les talibans, ni les Etats-Unis.""

On voudrait rajouter, ni le touriste qui pleure la perte d'un beau sujet photographique, comme il pleurera trois ans plus tard ses plages thaïlandaises ravagées par le passage du raz-de-marée.

Le réalisateur poursuit: ""Le détachement avec lequel je raconte l'iconoclastie fanatique des talibans est aussi mon message politique. Certes, décapiter une statue inoffensive et la détruire entièrement est une preuve d'ignorance. Mais la réaction à cette ignorance, par contre, se doit d'être tout autre qu'ignorance."""

Geneviève Praplan