Kilomètre zéro

Affiche Kilomètre zéro
Réalisé par Hiner Saleem
Pays de production Irak, France
Année 2004
Durée
Musique Nikos Kipourgos
Genre Drame
Distributeur Memento Films
Acteurs Nazmi K?r?k, Eyam Ekrem, Belçim Bilgin, Ehmed Qeladizeyi, Nezar Selami
Age légal 14 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 504
Bande annonce (Allociné)

Critique

"Au moment du conflit entre l'Irak et l'Iran, en 1988, Ako, un jeune Kurde, rêve de fuir le pays alors que sa femme refuse tant que son père est encore en vie, alors qu'il est mourant. Enrôlé de force dans l'armée irakienne et envoyé au front, Ako ne songe qu'à déserter. Jusqu'au jour où, en compagnie d'un chauffeur arabe, il est choisi pour ramener la dépouille d'un martyr de guerre à sa famille.

On aurait aimé dire grand bien d'un premier film traitant, sur fond d'histoire irakienne, du conflit entre Kurdes et Arabes. Mais que tout cela est emprunté et mal ficelé! Et à vouloir sans cesse détendre l'atmosphère par des scènes qui se voudraient comiques, le résultat frise souvent le ridicule. De ce film de guerre qui devient peu à peu un road movie funèbre, avec son cortège de voitures transportant sur leur toit un cercueil enveloppé dans un drapeau irakien, on ne retiendra que la triste impression que le courant ne passe décidément pas entre Kurdes et Irakiens arabes.



Georges Blanc





Le réalisateur de VODKA LEMON a choisi le trait burlesque pour évoquer la réalité kurde. Son film est drôle, mais il manque de force.

Fin des années quatre-vingts, l'Irak se bat contre l'Iran, guerre absurde pour Ako (Nazmî Kirik, qui, dans son Kurdistan natal, ne parviendra pas à échapper à l'appel. Il laisse au village son fils et son épouse (Belcim Bilgin) qui n'a pas voulu se réfugier en France à cause de son père malade. Les jours s'écoulent entre bombardements et ennui, impossible d'y échapper. Un jour pourtant, Ako reçoit l'ordre de ramener la dépouille d'un soldat à sa famille. Le cercueil, enroulé dans le drapeau irakien, est hissé sur le toit d'une voiture conduite par un Irakien. Ako le Kurde et son chauffeur arabe (Eyam Ekrem) vont traverser le pays avec leurs frustrations et leurs ressentiments.

Hiner Saleem, auteur de VODKA LEMON, a fuit le Kurdistan irakien à l'âge de 17 ans pour échapper à la dictature. Installé à Paris depuis les années quatre-vingts, il n'était jamais revenu dans son pays. ""Quand Saddam Hussein est tombé, je tournais VODKA LEMON en Arménie. Je n'ai eu qu'un désir, tourner au Kurdistan."" Il tenait le début de son scénario avec les déboires de son frère, déserteur de l'armée irakienne. Le reste est venu pendant le tournage.

C'est probablement pour cela qu'il manque à ce KILOMETRE ZERO une construction solide, un projet défini de bout en bout. Mais on peut trouver du charme à cette sorte de spontanéité qui affleure et lui donne parfois des airs de documentaire improvisé. Le film plonge dans la réalité kurde, peuple muselé dans les quatre Etats où l'a réparti le Traité de Lausanne en 1923. Muselé et opprimé, plus que jamais en 1988, en Irak, quand après une arabisation intensive, une partie du pays a été gazée par Ali ""le chimique"".

Plutôt que la tragédie, Hiner Saleem choisit l'humour caustique et la dérision. Les faits d'armes semblent tirés du théâtre comique. Il y a quelque chose de burlesque dans les brutalités, les crimes, les incohérences de la dictature. Comme ces cimetières roulants que sont les voitures corbillards, leur cercueil sur le toit, arrêtées en plein soleil pour ne pas déprimer le peuple en traversant la ville en plein jour.

La confrontation presque toujours silencieuse entre Ako et son chauffeur arabe en dit long sur les rancœurs des deux hommes, enfermés dans la même voiture, comme leurs deux peuples dans le même pays. ""Ils sont comme deux bombes à retardement, observe le réalisateur. On ignore quand elles vont exploser, mais elles vont exploser. Sans qu'on nous demande notre avis, nous avons été annexés à l'Irak et soumis à la majorité arabe. J'ai beau parler leur langue, je ne connais pas les Arabes. Je ne connais d'eux que la police et l'armée.""

En 2003, lorsque Bagdad tombe devant les alliés, les protagonistes de KILOMETRE ZERO chantent ""nous sommes libres""! Mais ils savent déjà que cette liberté n'est qu'une illusion. C'est tout le sens du titre de ce film.



Geneviève Praplan





Hiner Saleem: né en 1964 dans le Kurdistan, Hiner Saleem quitte son pays en 1981 et s'installe à Paris où il prépare son premier film VODKA LEMON (tourné en Arménie). Le gouvernement régional du Kurdistan l'aidera à réaliser KILOMETRE ZERO, une œuvre à la fois douloureuse et joyeuse que résume un des personnages du film: ""Notre passé est triste, notre présent est tragique, mais heureusement nous n'avons pas d'avenir."""

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