Okay

Affiche Okay
Réalisé par Jesper W. Nielsen
Pays de production
Genre
Acteurs Jennifer Peedom
N° cinéfeuilles 473

Critique

"Pleine de verve, la vie quotidienne d'une famille danoise, au bord de la crise de nerfs. Une comédie grave, racontée avec légèreté, et pleine de séquences savoureuses.

Qui dit ""cinéma danois"", pense souvent à Lars von Trier. La connotation est réductrice: à côté de l'auteur de DANCER IN THE DARK et de DOGVILLE, à côté de Thomas Vinterberg aussi (FESTEN), il y a d'autres cinéastes qui se sont affranchis - partiellement ou totalement - des règles et des influences du ""Dogma 95"" de leurs prédécesseurs. Et qui ont réalisé des films dignes d'intérêt. On se souvient sans doute de ITALIAN FOR BEGINNERS (Lone Scherfig) ou de OPEN HEARTS (Susanne Bier), on peut y ajouter RECONSTRUCTION (Christoffer Boe) et aujourd'hui OKAY, le troisième long métrage de Jesper W. Nielsen, qui n'a pas passé inaperçu dans plusieurs festivals.

OKAY débute comme une comédie de mœurs. Mère de Kathrine (16 ans), Nete (Paprika Steen) est une femme de tête, persuadée de tout maîtriser: boulot, éducation, famille, mari, tout est ""okay"" pour elle. Son père se révèle-t-il tout à coup gravement malade et en fin de vie? Qu'à cela ne tienne, on l'installe à la maison, avec sa télé et ses mauvaises habitudes. Son patron ne réagit-il pas comme elle le souhaiterait? Elle le plaque. Nete n'est pas de nature à se laisser faire, ni à mettre un bémol à son dynamisme personnel.

Trois semaines passent, puis un mois. Le vieux père malade est toujours là et les problèmes de la petite famille vont se multiplier: insatisfaction du mari, Kristian (Troels Lyby), qui va chercher du réconfort ailleurs; crise d'adolescence de sa fille, soutenue par le grand-père; bisbille entre le père de Nete et l'un de ses fils. Les cartes se brouillent, et tout n'est plus aussi ""okay"" qu'avant.

Le scénario du film de Nielsen part d'une bonne idée, celle de l'intrusion d'une personne extérieure (le vieil homme malade) dans un système familial où l'organisation rationnelle et le stress font plus ou moins bon ménage. La première moitié du film - le temps pour Nete de prendre conscience de ses limites - est bonne. La fin de l'histoire, en revanche, est laborieuse, d'autant plus qu'à côté des quatre protagonistes déjà cités s'en ajoutent d'autres qui génèrent un certain désordre: Martin (le frère homosexuel de Nete) et deux lesbiennes en mal de procréation sont sans doute là pour faire diversion et laisser de la place à la comédie, mais leur présence peu justifiée - avec un jeu souvent caricatural - déstabilise et affaiblit le récit.

L'originalité de OKAY tient avant tout dans le ton adopté, celui du drame dérivant vers une comédie parfois grinçante, par instants sentimentale, un peu molle aussi. De cette observation d'une famille, avec ses non-dits, ses petits riens et ses signes de dysfonctionnement, reste pourtant un film intéressant. La figure centrale de Nete, femme forte et vulnérable à la fois, tantôt pleine d'humour, tantôt remplie de colère, habituée à tout gérer (""Tu ne pourras pas sauver la terre entière!"" lui rappelle-t-on pourtant) n'est pas banale. Personnage intelligent et attachant, énergique et courageuse, Nete prend beaucoup de place, côtoyant des hommes dont les rôles sont souvent ceux des ""viennent-ensuite"", comme Kristian (le mari), cafouilleur-né cherchant à ne pas tout dire pour éviter les disputes.

OKAY se veut ancré dans la réalité et l'on ne va pas s'en plaindre. Faisant fi des règles d'austérité de ""Dogma"", sans chercher non plus à plaire à tout prix à un très large public, OKAY porte un regard sensible et précis, par moments un peu complaisant c'est vrai, sur des personnages que le cinéaste observe et scrute patiemment. Un film grave et drôle à la fois, plein de séquences savoureuses, et porté par des comédiens excellents. Impétueuse et mordante, Paprika Steen (déjà appréciée dans FESTEN, DANCER IN THE DARK, OPEN HEARTS, etc.) est remarquable."

Antoine Rochat