Critique
Un beau quartier de Téhéran. Hussein, lors d'un hold-up raté, tue un bijoutier dans sa boutique et se donne la mort. Derrière ce fait divers sanglant se cache le récit d'un homme solitaire, sans le sou et écœuré par le monde qui l'entoure. Après ce prologue (c'est en fait l'épilogue du film), Jafar Panahi opère un flash-back pour expliquer le geste désespéré de Hussein, individu marginalisé, petit livreur de pizzas humilié un jour par le bijoutier qui lui avait interdit l'accès à sa boutique parce qu'il était trop mal habillé. Sur un scénario de Kiarostami, Panahi (LE CERCLE, 2000) brosse une description très critique de la société urbaine iranienne, celle des quartiers riches où l'on fait la fête jusqu'au petit matin, celle qui est aussi l'objet de la surveillance d'une police qui procède volontiers semble-t-il à l'arrestation de jeunes et de suspects. Tableau amer et désabusé d'un monde où l'on découvre qu'il y a d'un côté une concentration de l'argent et du pouvoir, et de l'autre des signes évidents de privation et d'humiliation, SANG ET OR ne délivre pas de message mais, par la force tranquille de ses images, oblige à la réflexion.
Antoine Rochat