Mille mois

Affiche Mille mois
Réalisé par Faouzi Bensaïdi
Pays de production France, Maroc, Belgique
Année 2002
Durée
Genre Drame
Distributeur MK2 Diffusion
Acteurs Mohamed Majd, Nezha Rahil, Fouad Labied, Abdelati Lambarki, Mohamed Bastaoui
Age légal 12 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 460
Bande annonce (Allociné)

Critique

"Maroc, 1981, le mois du Ramadan.

Mehdi, un petit garçon vit avec sa mère et son grand-père dans un petit village au cœur des montagnes de l'Atlas. Son père est en prison, mais sa mère lui fait croire qu'il travaille en France. Les problèmes d'argent sont de plus en plus importants dans cette famille éclatée, mais Mehdi a le privilège de veiller sur la chaise de l'instituteur, la dernière fierté de son grand-père.

Ce premier long métrage de Faouzi Bensaidi, le scénariste entre autres de LOIN d'André Téchiné, se déroule durant le mois du Ramadan, le plus important dans le calendrier musulman, mais au lieu de l'inscrire dans une perspective uniquement religieuse, il montre la profonde humanité d'une série de protagonistes. Loin des clichés des ""bons"" musulmans qui ne penseraient qu'à la prière et au jeûne, il les met en scène dans tous leurs doutes, leurs désirs, leur relation au monde jour après jour. Ce point de vue s'avère intéressant et bien amené, même si certaines scènes paraissent un peu superflues ou inadéquates. Ce défaut nuit à la cohérence de l'ensemble du récit, tout comme plusieurs personnages moins bien définis dans le scénario, mais peut-être aussi à cause de l'inexpérience d'acteurs non professionnels. Le cinéaste marocain ne raconte pas une histoire, mais fait le portrait d'une petite communauté aux multiples facettes à travers des scènes inégales, tantôt vivantes, tantôt anecdotiques. Ce procédé, pas entièrement maîtrisé, provoque des chutes de rythme et risque de distraire les spectateurs. Sa longueur excessive cause le même effet. MILLE MOIS reste une œuvre honnête, sensible, parfois poétique.



Ivan Corbisier





Description d'un équilibre de vie familiale fragile, au cœur des montagnes de l'Atlas marocain, le premier long métrage de Faouzi Bensaïdi est un film à la fois contemplatif et dynamique, violent et retenu. Plus que l'histoire de Mehdi - jeune garçon de 7 ans -, MILLE MOIS est une œuvre polyphonique parfaitement achevée.

La population de tout un village marocain de l'Atlas s'est réunie sur une colline. La nuit tombe et on scrute l'horizon: chacun attend de voir apparaître le croissant de lune annonçant le début du Ramadan.

Le cadre ainsi posé, le spectateur suit l'histoire de Mehdi, jeune garçon d'une famille pauvre qui attend le retour de son père. Sa mère et son grand-père lui ont dit qu'il était parti travailler en France, mais on apprend qu'il est en prison, pour des raisons politiques semble-t-il. Durant tout le mois du Ramadan, le cinéaste accompagne ce jeune garçon, et c'est avec ses yeux d'enfant que l'on découvre la vie quotidienne - entre tradition et modernité - du village. C'est à Mehdi par exemple que le maître d'école a demandé - c'est un privilège - de prendre soin de la chaise de son pupitre, parce qu'il craint de la voir disparaître. Le jeune garçon s'en occupe donc, l'emporte et la charge souvent sur sa tête, la chaise devenant en quelque sorte le fil rouge du film. A côté de Mehdi il y a sa mère, Amina, qui met toute son énergie à essayer d'entretenir la famille; il y a Ahmed, le grand-père, qui travaille à la mine parce que l'Etat lui a confisqué ses terres après l'arrestation de son fils. On croise aussi un paysan, porteur d'eau solitaire et irascible, et une jeune fille qui essaie de s'émanciper en apprenant l'anglais. Et beaucoup d'autres personnages encore, attachants ou antipathiques, décrits par petites touches sensibles.

MILLE MOIS est une œuvre contemporaine, même si l'histoire renvoie à plus de vingt ans en arrière (elle se déroule en 1981). Le cinéaste parle du présent politique, culturel et religieux de son pays: beaucoup de choses sont dites tout au long de ce film dont le rythme est parfois lent, parfois plus soutenu. Les événements se succèdent, tantôt tristes, tantôt drôles, portés par des images étonnantes.

MILLE MOIS est un film réussi. On sent chez Faouzi Bensaïdi l'homme de théâtre (il a été acteur et metteur en scène) et l'homme de cinéma (il a travaillé avec André Téchiné, signant en particulier, en 1999, le scénario de LOIN). La structure dramatique du film, toute classique, est solide, la maîtrise de l'espace remarquable: dans une utilisation parfaite de l'écran large, de la profondeur de champ et du cadrage, Bensaïdi arrive à saisir la beauté aride des paysages. La poésie affleure aussi, sans empiéter sur le terrain de l'intrigue ou du discours. Tous les personnages - acteurs professionnels ou amateurs (les habitants du village) - sont à leur place, bien dirigés, circulant dans les rues ou dans les champs, toujours suivis par une caméra discrète qui les intègre dans le décor, et qui ne laisse rien au hasard. Un film tragique par moments, mais qui témoigne fortement aussi d'une joie de vivre. Une première oeuvre d'une très grande maturité.



Antoine Rochat





Faouzi Bensaïdi: né à Meknès, comédien, metteur en scène de théâtre, scénariste et réalisateur,. Faouzi Bensaïdi vit aujourd'hui entre Paris et Casablanca. Il a réalisé son premier court métrage en 1997 (LA FALAISE, qui reçut vingt-trois prix dans des festivals français et internationaux). Esprit indépendant, il dit fuir les vagues et les groupements. ""J'ai plus d'affinités avec les cinéastes disparus. C'est une relation plus facile à gérer, et finalement bien plus durable..."""

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