Gangs of New York

Affiche Gangs of New York
Réalisé par Martin Scorsese
Pays de production U.S.A., Pays-Bas, Grande-Bretagne, Allemagne, Italie
Année 2002
Durée
Musique Howard Shore
Genre Historique, Drame, Action
Distributeur SND
Acteurs Brendan Gleeson, Cameron Diaz, Leonardo DiCaprio, Liam Neeson, Daniel Day-Lewis
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 451
Bande annonce (Allociné)

Critique

"La dernière saga de Scorsese couvait depuis un tiers de siècle. Son étoffe somptueuse couvre une œuvre taillée à la hache. Sans nuances ni questionnements: mais si captivante!

En 1970, Martin Scorsese lit par hasard un livre écrit en 1928 par Herbert J. Asbury sur l'histoire des gangs new-yorkais. Immédiatement passionné, il veut en faire un film. Suivent trente-trois ans de riche maturation, de refonte du scénario, de recherche opiniâtre d'un producteur à la hauteur des ambitions du projet.

Dès les premières images, le film fascine, éblouissement mêlant l'horreur des violences au bonheur d'un récit cinématographique superbement tissé. La séquence d'introduction - vertigineuse - donne le ton et plante le décor. Hiver 1840: au cœur d'un quartier miséreux de New York, les Five Points (à quelques jets de pierres de l'actuel ""Ground zero""), deux gangs s'affrontent sans merci. D'un côté, des Irlandais catholiques, fraîchement immigrés. A leur tête, le Père Vallon qui tombe ce jour-là sous les coups de son ennemi.

Bill le Boucher (Daniel Day-Lewis), chef des ""Natives"" (les Américains de souche), achève en effet le Père Vallon au couteau, sous les yeux de son fils Amsterdam encore enfant. Le vainqueur interdit à quiconque de toucher au corps de ce prestigieux combattant qu'il vénérera toute sa vie. Nez, yeux ou oreilles sont les trophées prélevés sur les cadavres des autres ""Dead rabbits"" désormais bannis de la ville. Vingt ans plus tard, Amsterdam revient à New York. Le fil rouge du film est la vengeance qui le pousse vers le meurtrier de son père.

A partir d'une foule d'éléments historiques minutieusement reconstitués (et de quelques autres assez librement interprétés), Scorsese brosse une imposante fresque, décor de sa narration fictive. Y figure l'histoire des Etats-Unis, en pleine guerre de Sécession, à un moment où la démocratie est mise à l'épreuve de manière cruciale. Y est dépeinte surtout l'histoire de New York avec ses hordes d'immigrés (il y eut jusqu'à 15'000 arrivées par semaine), haïs par les autochtones menacés dans leur bien-être déjà précaire. A Five Points, la misère sévit. Partout, la corruption règne. Les gangs s'affrontent sauvagement, manœuvrés souvent par des politiciens véreux. En 1863, de sanglantes émeutes feront réellement 1'200 morts. Les classes ouvrières, furieuses de voir les riches payer des remplaçants pour éviter de partir à la guerre, descendent dans la rue. Scorsese dissout là son film: ses héros disparaissent avec leurs destins. Le quartier sera rasé.

GANGS OF NEW YORK n'est pas un chef-d'œuvre. La magnifique mise en images des soubassements de sa ville fétiche, dessinée avec les foisonnants pinceaux de ses fantasmagories, ne parvient pas à masquer son incapacité à placer les événements dans une vraie perspective (même au prix de quelques grossières ""simplifications historiques""). Et puisque Amsterdam (pâlot DiCaprio) n'est pas crédible en messie populaire, puisque l'intrigue amoureuse reste insignifiante - elle n'est là que pour retarder les assauts de la vengeance - le serpent finit par se mordre la queue: le film s'enroule autour de sa propre violence. Des amoncellements sanglants, on attend qu'émerge une tête interrogative. En vain.

Pourtant allez voir GANGS OF NEW YORK, l'allure de son récit, sa maîtrise parfaite de la mise en scène, somptueusement servie par l'image de Michael Ballhaus, le décor de Dante Ferretti (entièrement reconstitué à Cinecittà après de très minutieuses recherches) et les costumes de Sandy Powell. Allez voir un film musclé, peuplé de brillants personnages secondaires. Et courez voir un excellent comédien: Daniel Day-Lewis, impressionnant Bill le Boucher."

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