Un temps pour l'ivresse des chevaux

Affiche Un temps pour l'ivresse des chevaux
Réalisé par Bahman Ghobadi
Pays de production Iran
Année 2000
Durée
Genre Drame
Acteurs Amaneh Ekhtiar-Dini, Ayoub Ahmadi, Jouvin Younessi, Madi Ekhtiar-Dini, Nezhad Ekhtiar-Dini
Age légal 12 ans
Age suggéré 15 ans
N° cinéfeuilles 394

Critique

Au Kurdistan iranien, près de la frontière avec l'Irak, cinq frères et soeurs (orphelins) vivent en subvenant seuls à leurs besoins. Le cadet souffre d'une grave maladie qui exigerait une opération (coûteuse) rapide. Malgré les efforts de l'aîné, qui multiplie les petits boulots de contrebande pour gagner un peu d'argent, la famille n'a pas les moyens d'assumer l'opération. La soeur aînée accepte alors de se marier avec un Irakien prêt à les aider financièrement...

L'un des plus beaux films vus à Cannes cette année. Bahman Ghobadi, qui fut assistant d'A. Kiarostami, s'est inspiré d'une histoire vraie. Lors du tournage d'un court métrage, le cinéaste kurde a rencontré des jeunes qui faisaient de la contrebande entre le Kurdistan iranien et le Kurdistan irakien, franchissant des cols enneigés avec des chevaux auxquels il fallait de temps en temps faire avaler quelques rasades de whisky... De très belles images qui vous coupent le souffle, un rythme narratif maîtrisé et une vision, tendre tout en étant rigoureuse, d'une dure réalité où êtres humains et chevaux partagent les mêmes épreuves.



Antoine Rochat





Présenté à Cannes à la Quinzaine des réalisateurs, ce long métrage du premier réalisateur kurde iranien a récolté trois prix, dont la Caméra d'Or.

Dans les montagnes qui séparent l'Iran et l'Irak, cinq enfants orphelins tentent de survivre en accomplissant tous les petits boulots qui se présentent. Leur mère est morte en mettant au monde la benjamine et le père est tué par une mine déposée sur les chemins de la contrebande qui fait vivre les villages pendant l'hiver.

Pour compléter ce sombre tableau, l'un des enfants souffre d'une grave maladie. S'inspirant d'une histoire vraie, Bahman Ghobadi nous dévoile un coin de ce pays qu'est le Kurdistan écartelé entre quatre Etats. Tout cela se déroule pendant l'hiver, le climat est rude et les mœurs le sont aussi. Cette famille d'enfants pourrait être un modèle. La sœur aînée et le plus jeune des frères tiennent le rôle des parents et font preuve d'un esprit de sacrifice extraordinaire envers l'aîné malade et une sœur encore à l'école bien qu'eux-mêmes soient encore en âge scolaire.

On est bouleversé autant par ces figures d'enfants soumis à la tutelle d'un oncle mais se débrouillant seuls, que par l'esprit de famille qui les unit.

Constamment, on se trouve en face de contrastes forts: la solidarité qui lie les enfants contraste avec la dureté des adultes dont ils ne reçoivent pratiquement rien et devant lesquels ils n'ont pourtant rien à dire. Tous droits leur sont déniés parce qu'ils sont des enfants alors qu'ils se comportent mieux que des adultes. Fréquemment, Bahman Ghobadi oppose le monde des adultes, trompeurs, sans cœur, égoïstes, au monde des enfants, confiants, généreux, aimants.

Contraste également à l'intérieur du cadre traditionnel qui régit la vie quotidienne: il assure à la fois une certaine sécurité et protection en organisant la vie en société et ajoute à la détresse des enfants en certaines circonstances, par exemple le mariage de la sœur aînée.

Contraste encore entre la vie quotidienne de ces montagnards transportant des marchandises à dos de mulet tandis que leurs enfants lisent à vois haute les exploits de l'Homme sur la Lune. Contraste enfin confinant à l'absurdité entre ces colonnes de mulets abreuvés d'eau mélangée d'alcool et leur chargement de pneus de camions.

Le spectateur doit savoir que l'enfant malade qui joue dans le film n'a effectivement que deux ans encore d'espérance de vie et pourrait être soigné en Allemagne si l'argent nécessaire ne manquait pas.



Maurice Gonce





Bahman Ghobadi:

Cinéaste kurde ayant débuté par le documentaire, Bahman Ghobadi appartient à la deuxième génération des cinéastes iraniens, celle qui a travaillé aux côtés d'Abbas Kiarostami et de Moshen Makhmalbaf. En tant qu'acteur, il est l'un des deux instituteurs que l'on retrouvera prochainement dans le film, aussi primé à Cannes, LE TABLEAU NOIR, de Samira Makhmalbaf.

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