L'édito de Serge Molla - Birchermüesli

Le 06 juin 2011

Dans un domaine aussi subjectif que celui de la critique cinématographique, un palmarès prête toujours à discussion. Celui du Festival de Cannes 2011 n’échappe pas à la règle et, chaque année, chacun y va de ses commentaires. En sa qualité de président du Jury œcuménique, le soussigné a vu les 21 films de la compétition dans leur intégralité et certains films des autres sections n’ont pas échappé à son regard.

Le sentiment que laisse le choix opéré par Robert De Niro et son équipe est mélangé. Comme d’habitude, on a l’impression d’un dosage subtilement «politique», où l’on a essayé de ménager la chèvre et le chou. L’accueil en vision de presse de THE TREE OF LIFE a été mitigé, et l’on a enregistré des réactions excédées devant une conclusion qui «n’en finit pas de finir»; contrairement à des pronostics prétendument autorisés, le très long métrage de Terrence Malick, avec sa philosophie de supermarché, n’a pas séduit le Jury œcuménique. Le Prix du Jury récompensant POLISSE de Maïwenn, téléfilm amélioré salué par un concert de cocoricos dans la presse française, a semblé être un sucre remis au pays hôte… Le Grand Prix ex æquo a peut-être voulu honorer le métier de Nuri Bilge Ceylan et l’art des frères Dardenne de concocter toujours le même gâteau avec des ingrédients invariables. Le Prix de la mise en scène remis à Nicolas Winding Refn entendait-il rehausser sa série B DRIVE? Par ailleurs, d’autres comédien(ne)s auraient aussi amplement mérité d’être salués.

Nous renonçons à décortiquer l’ensemble du palmarès, tout en reconnaissant la clairvoyance des jurys des autres sections. Et le Jury œcuménique est fier d’avoir distingué THIS MUST BE THE PLACE, de Paolo Sorrentino, qui, plutôt que d’être un objet lisse et bien ficelé que l’on ne peut faire autrement que de le recevoir tel quel, a le mérite d’ouvrir de nombreuses pistes de réflexion; ses Mentions spéciales honorent deux œuvres dignes, celles d’Aki Kaurismäki, auteur plus que confirmé (LE HAVRE), et de Nadine Labaki, réalisatrice prometteuse et engagée (ET MAINTENANT ON VA OU?) Trois cerises sur le birchermüesli!

Daniel Grivel (CF 637-638)