The Grand Budapest Hotel

Wes Anderson nous avait enchanté avec Moonrise Kingdom (2012), et il récidive avec un film tout aussi délicieusement déjanté, riche d'une distribution éblouissante. Inspiré d'écrits de Stefan Zweig et de comédies des années 1930, il situe l'histoire dans le Grand Budapest Hotel, fleuron de la république imaginaires de Zubrowka, quelque part en Europe centrale. Le monument rappelle le Suvretta House de Saint-Moritz et ne déparerait pas à Sotchi... mais le monument le plus important est l'«homme aux clefs d'or», M. Gustave (Ralph Fiennes), pour qui clients et surtout clientes n'ont pas de secrets... Au décès de Mme D. (savoureuse dé... composition de Tilda Swinton), il hérite d'un précieux tableau qu'il s'empresse de mettre en lieu sûr avant la ruée de tous les prétendants au pactole. Accompagné de son jeune groom Zéro Moustafa (Tony Revolori, qui réapparaîtra en veillard sous les traits de F. Murray Abraham), il va vivre les soubresauts des vestiges de l'empire austro-hongrois, connaîtra les geôles communistes et sera secouru par l'efficace confrérie des concierges de palaces.
Impossible de narrer par le menu les aventures picaresques de M. Gustave, truffées de clins d'oeil et de gags inspirés de films muets, avec un kitsch assumé. La musique d'Alexandre Desplat y contribue, entremêlant yodel et balalaïkas. Les décors montagnards semblent tirés de l'album de Daniel Schmid L'invention du Paradis, consacré à la naissance du tourisme en Suisse (soit dit en passant, Dimitri, fils de la richissime défunte incarné par Adrian Brody, fait penser au cinéaste grison dans ses jeunes années...). On ne s'ennuie pas une seconde à déguster ce cocktail littéraire et cinématographique où Lubitsch, Wilder, Welles et Polanski s'entrecroisent avec le sourire.