Millénium 2

Seul le premier volume de Millénium (Les hommes qui n’aimaient pas les femmes) devait être adapté au cinéma, les deux suivants ne bénéficiant que d’une diffusion en DVD. Mais face au succès du volet initial de la célèbre saga de Stieg Larssen (voir l’article de Daniel Grivel, CF n. 590 p. 13), la maison de production a décidé de sortir aussi sur grand écran les deux derniers opus. Dans MILLENIUM 2, le réalisateur Niels Arden Oplev cède sa place à Daniel Alfredson, qui reconduit la même équipe d’acteurs et de techniciens.

Dans ce deuxième volet (La fille qui rêvait d’un bidon d’essence et d’une allumette), Dag, jeune journaliste, et Mia, étudiante en train de rédiger une thèse, proposent à Mikael Blomkvist (Michael Nykvist) un «scoop» pour son magazine Millénium: elles affirment que des citoyens et des fonctionnaires connus couvrent depuis des années un trafic de jeunes femmes amenées en Suède depuis les pays baltes et obligées de se prostituer. Blomkvist décide de pousser ses investigations dans cette direction. Lisbeth Salander (Noomi Rapace) - jeune femme qui a un lourd passé psychiatrique et se trouve sous tutelle - poursuit elle aussi des recherches identiques, à l’insu de Blomkvist. Elle découvre qu’un de ses anciens tuteurs, Nils Bjurman, est impliqué dans les magouilles mentionnées plus haut. Peu de temps après, Dag, Mia et Bjurman sont retrouvés morts et l’arme du crime porte les empreintes de Lisbeth. Débute alors une chasse à l’homme (ou à la femme) médiatisée, mais Lisbeth disparaît. Seul Blomkvist croit à son innocence…

Voilà pour les toutes premières séquences de MILLENIUM 2... La fuite de Lisbeth et l’enquête menée par Blomkvist constitueront la matière de ce long film, l’infléchissant en direction du polar et du film d’enquête, une démarche dynamique qui permettra de maintenir l’intérêt. MILLENIUM 2 plongera dans le (très) sombre passé de Lisbeth, révélant des secrets et des horreurs frisant l’abjection. De nombreuses pistes et thèmes sont évoqués: culpabilité ou innocence, liberté ou emprisonnement, objectivité de l’enquête ou faux témoignages, vie ou mort… Les deux héros principaux - on laissera les autres de côté, il y en a une bonne vingtaine - verront leurs destinées se croiser, dans un suspense bien mené, même s’il n’apporte rien de très nouveau sur le plan du cinéma: les flash-back, les rêves, les poursuites, c’est du déjà-vu. Les qualités de ce film, très classique dans sa facture, se situent surtout au niveau du jeu des acteurs, du choix des détails, d’une structure narrative complexe mais solide, d’un montage judicieux (il faut aller vite, les ellipses et les enchaînements sonores y contribuent). Psychologie et réflexion, en revanche, sont réduites à la portion congrue. Se dégage de tout cela un tableau en creux d’un monde crapuleux, d’où l’Etat lui-même ne sort pas indemne: certaines séquences du film font référence, paraît-il, à des affaires remontant aux années 70-80…