Chocolat

Affiche Chocolat
Réalisé par Lasse Hallström
Pays de production Grande-Bretagne, U.S.A.
Année 2000
Durée
Musique Rachel Portman
Genre Comédie, Romance
Distributeur Bac Films
Acteurs Johnny Depp, Juliette Binoche, Judi Dench, Lena Olin, Alfred Molina
Age légal 14 ans
N° cinéfeuilles 409
Bande annonce (Allociné)

Critique

Un divertissement raffiné comme une délicieuse bouchée de chocolat surfin. Mais à y croquer de plus près, le film laisse quelques arrière-goûts plus mitigés.

Vianne (Juliette Binoche) et sa fille Anouk débarquent de nulle part dans une petite bourgade française à l'orée du Carême. Le projet de Vianne est d'y ouvrir une chocolaterie. Elle y met toute son énergie, plus un zeste de provocation. Elle multiplie les approches choco-séductrices à l'égard de sa future clientèle, pétrifiée dans l'obscurantisme catholico-étatique ambiant. Le comte - maire du lieu et correcteur des sermons du jeune curé - le jure: la chocolaterie aura fermé avant Pâques.

Les semaines passant, Vianne séduit une poignée de gourmands partisans. Elle le doit aux vertus de ce chocolat aux saveurs exquises. Minutieusement choisi parmi l'assortiment magique de la chocolatière, il donne à chacun la vertu qui lui manque - courage, franchise et même supplément de libido - pour trouver le chemin du bonheur. Mais la résistance s'organise et fait feu. Vianne devra-t-elle une fois de plus changer de ville et poursuivre son errance? Ou bien parviendra-t-elle à conquérir sa place dans la communauté villageoise sans renoncer à ses idéaux?

Le film est à l'image des gourmandises amoureusement présentées dans la vitrine: onctueux et délectable. Les images sont comme tirées d'un livre de contes, colorées et chaleureuses. Les dialogues agréables et subtils. Et surtout, Juliette Binoche est parfaite, imprégnant l'ensemble de toute la grâce et de tout le charme dont elle est capable. Un vrai plaisir. Même Johnny Depp en est réduit au rôle de figurant.

Une fois les douceurs dégustées, CHOCOLAT révèle toutefois plusieurs points faibles. Le principal est le flottement du récit. Si l'action se situe en 1959, les événements qui surviennent appartiennent à plusieurs époques, parfois révolues (la découverte du chocolat dans un village français, l'asservissement du clergé à l'état) ou encore à venir (l'arrivée des hippies par le fleuve). Autres flottements: celui du sens (le vent du Nord apporte la liberté et la vie, mais à la fin se fait proprement congédier) celui des genres (entre conte moderne, chronique villageoise et drame socio-psychologique). Le flou qui résulte de ces flottements nuit à l'équilibre de l'ensemble.

Un autre manque paraît plus redoutable: si le genre métaphorique permet une accentuation grossière des traits (les caricatures du comte ou du curé), il requiert en revanche un lien immédiat et évident avec des réalités proches du spectateur. Certes, le conflit entre conformisme et progrès parle à chacun. Mais à quoi diable raccrocher dans nos quotidiens actuels des notions comme l'observance du Carême (et le péché de gourmandise)? La fidélité servile à une institution ecclésiale (fut-elle, comme ici, boursouflée)? Ou encore l'appel du large, relayé par les embarcations soixante-huitardes du fleuve tranquille? Mis à part la brillante prestation de Juliette Binoche, le film laisse en fin de compte le sentiment d'un produit qui sent un peu le carton-pâte, mitonné selon les recettes rapides de la cuisine mondialisée. L'objectif? Une friandise abondamment consommable des deux côtés de l'Atlantique.

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