Trois huit

Affiche Trois huit
Réalisé par Philippe Le Guay
Pays de production France
Année 2000
Durée
Musique Yann Tiersen
Genre Drame
Distributeur Velvet Films
Acteurs Gérald Laroche, Marc Barbé, Luce Mouchel, Bastien Le Roy, Bernard Ballet
Age légal 12 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 418
Bande annonce (Allociné)

Critique

Une journée de 24 h est divisible par trois, ce qui donne huit. Une aubaine pour les industries qui font tourner leurs machines 24 h sur 24. Trois équipes se relaient, toutes les huit heures.

A Châlon, Pierre (Gérald Laroche) travaille dans une verrerie et décide d'entrer dans l'équipe de nuit. Il y retrouve des connaissances, mais aussi un certain Fred (Marc Barbé) décidé à lui mener la vie dure. Simple mise à l'épreuve du nouveau? Une sorte de bizutage? Pierre voudrait le croire, mais il devra comprendre qu'il s'agit d'autre chose. Pour lui, l'enfer commence dans le rougeoiement du verre en fusion. Fred le provoque, l'humilie, le frappe, puis lui fait croire qu'il est son ami pour mieux le provoquer encore et le piéger. Le reste de l'équipe fait tantôt le jeu de Fred (parce que c'est plus simple de suivre celui que l'on redoute), tantôt se contente d'observer en hochant la tête, en ne s'interposant que rarement.

Fred a la force physique pour lui; face à ce type d'agression toujours cachée sous autre chose, Pierre ne sait comment réagir. Sa philosophie de la vie, son tempérament naturellement paisible, le laissent à la merci de Fred. Peu à peu, ce harcèlement empoisonne sa vie, et se révèle dangereusement destructeur pour un homme qui veut être bon, qui veut aimer tout le monde, qui croyait être aimé de tout le monde, et qui veut croire que l'on peut changer les gens par la bonté. Mais a-t-il les moyens de penser différemment? Sa naïveté seule est indemne de toute arrière-pensée. Elle se paye cher, mais elle est la beauté des âmes bonnes et la force de ceux qui n'imaginent pas un instant qu'on puise leur faire du mal. On n'est pas loin de l'Evangile (Heureux les simples...)

Si l'histoire s'achève bien, la dernière scène n'est pas faite pour autant pour nous rassurer complètement et nous permettre de quitter notre fauteuil soulagé. Sans son épouse Carole (Luce Mouchel), l'histoire de Pierre ne pourrait que se terminer par une tragédie. Intelligente, solide, elle va sauver son mari, son couple. Elle a une meilleure situation professionnelle que lui, un meilleur salaire très probablement, mais jamais ce qu'elle fait pour Pierre n'est inspiré par autre chose que par l'amour.

TROIS HUIT n'est ainsi pas seulement un très beau film sur le harcèlement moral au travail, mais sur ce que peut être un couple confronté à un tel travail de déstabilisation psychologique, lorsque l'un doit être fort pour deux, voire trois (le couple a un fils, Victor).

Inspiré d'une histoire vraie transposée d'un autre milieu de travail (mais des histoires vraies comme celle-ci, il doit s'en trouver des centaines, bien cachées dans les bureaux, les ateliers, les magasins...), le film de Philippe Le Guay est tout aussi intelligent et remarquable que le personnage féminin de Carole.

Ancien membre