Fabuleux Destin d'Amélie Poulain (Le)

Affiche Fabuleux Destin d'Amélie Poulain (Le)
Réalisé par Jean-Pierre Jeunet
Pays de production France
Année 2001
Durée
Musique Yann Tiersen
Genre Comédie
Distributeur UFD
Acteurs Audrey Tautou, Jamel Debbouze, Rufus, Isabelle Nanty, Mathieu Kassovitz
Age légal 7 ans
Age suggéré 12 ans
N° cinéfeuilles 413
Bande annonce (Allociné)

Critique

"Le bonheur est dans le pré, c'est le poème qui vient à l'esprit au fur et à mesure que se déguste la dernière petite merveille de Jean-Pierre Jeunet. Son film est d'ores et déjà l'un des vrais plaisirs de l'année cinématographique.

""Fabuleux"", prononcé dans la conversation de tous les jours, signifie exceptionnel, hors du commun. Dans sa signification première, il qualifie un événement de la mythologie. Ni celle-ci, ni celle-là, de ces définitions, ne convient exactement aux aventures d'Amélie Poulain. C'est ""merveilleux"" qu'il faudrait comprendre. Car Jean-Pierre Jeunet emmène son public au pays des enchanteurs, avec un personnage clé, dessiné de toutes pièces, dans un décor peuplé de bonnes fées. Pourtant, Amélie Poulain (Audrey Tautou) est entrée dans la vie par la mauvaise porte. De multiples malheurs, dont la mort brutale de sa mère, la ferment aux bons côtés de l'existence et lui apprennent à fuir du côté du rêve. Devenue adulte, elle trouve du travail comme serveuse dans un café dont les habitués composent une collection de portraits qui prolonge celle de son immeuble. Alors que Lady Di se tue en voiture, Amélie découvre une boîte qui la tire de son introversion et lui jette un défi. Si le propriétaire de la boîte paraît s'intéresser aux autres, alors elle aussi, Amélie, aidera chacun à réparer sa vie, avant de réparer la sienne.

On s'en doute, LE FABULEUX DESTIN D'AMELIE POULAIN n'a rien à voir avec un cours sur la charité. Heureusement. C'est tout l'art de Jean-Pierre Jeunet que de composer des personnages originaux, belle réussite d'équilibre entre humour, sagesse, et poésie. Capable, en vrai successeur de Jacques Prévert, d'imaginer les rencontres les plus saugrenues et les plus délicates, il se sert de ce talent pour montrer la simplicité de la vie, le bonheur des petites choses, la vanité des grandes ambitions. Sans pour autant faire de la morale. Il joue avec des évidences oubliées, glisse du printemps dans les journées brumeuses et des sourires malicieux dans le métro. Les hommes, les femmes, les vieillards, les enfants qui vivent autour d'Amélie sont des êtres façonnés dans une tendresse parfois déçue, parfois comblée, parfois timide. Ils souffrent de quelques bleus qui ont coincé leur existence. Il suffit souvent de peu, d'une facétie d'Amélie par exemple, pour que l'ecchymose s'atténue. Le film est construit à partir d'histoires vécues, d'autres imaginées. Elles s'harmonisent dans une construction toute naturelle qui ferait presque passer le ""merveilleux"" du côté de la réalité.

Côté caméra, Jeunet fait preuve de tout autant d'imagination. Son Paris est filmé avec une virtuosité infatigable. C'est le Paris des rues piétonnes, petits quartiers ordinaires, leurs bistrots, leurs primeurs. Les voitures en sont absentes et le métro ne s'y entend guère, mais les Parisiens sont bien là, dans ces coins de rue que les touristes désertent. Ces images, entre lesquelles il insère des bouts de film TV, sont tournées en décor naturel. ""J'ai cherché dans l'imagerie de Paris tout ce qui me plaisait et qu'on peut rapprocher des bandes dessinées de Tardi, les métros aériens, certains monuments, les escaliers, les pavillons de banlieue"", précise le réalisateur. Le sens de l'esthétique, la richesse inépuisable d'idées nouvelles font qu'on se demande parfois s'il tiendra le rythme jusqu'au bout du film? La réponse est oui. Et ce sera la seule réserve à l'égard du travail de Jean-Pierre Jeunet: ce sentiment qu'il en fait - presque - trop. Mais c'est un sentiment fugace."

Geneviève Praplan