La Belle de Gaza

Affiche La Belle de Gaza
Réalisé par Yolande Zauberman
Pays de production France
Année 2024
Durée
Genre Documentaire
Distributeur Sister Distribution
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 923

Critique

Autrice sans fards ni conventions, la cinéaste française Yolande Zauberman n’a de cesse d’ouvrir aux autres un espace cinématographique hors du temps. Explorant la société israélo-palestinienne au-delà de ses tabous depuis dix ans, elle arpente encore une fois les rues faussement endormies de Tel-Aviv pour ce 3e volet de La trilogie de la nuit, à la recherche de la belle de Gaza, une femme transgenre gazaouie qui aurait rejoint Tel-Aviv à pied.

Pendant qu’elle tournait M, son précédent documentaire multi-primé, traçant le parcours d’un homme abusé dans son enfance par un prédateur sexuel de sa communauté orthodoxe (César du Meilleur documentaire en 2020), Yolande Zauberman aurait aperçu une sublime Palestinienne sur le trottoir des nuits d’Hatnufa, quartier incandescent de Tel-Aviv. La Belle de Gaza, comme elle l’a nommée dans son esprit, partage l’histoire difficile de toutes ces femmes trans se réfugiant dans la noirceur de la nuit. 

Fuyant l’extrême violence de leur milieu respectif, chacune se réinvente face à l’objectif qui transforme cette quête quasi mythique en portraits multiples, tissés dans la parole de ces êtres qu’elle aborde avec toujours la même question: «Je cherche cette femme, on dit qu’elle vient de Gaza, vous la connaissez?» Qu’importe la réponse, chacun·e semble se reconnaître dans cette personne devenue légende, aperçue entre les phares des voitures indiscrètes. S’ouvre avec chaque rencontre une dimension protectrice, où dans l’intimité des confidences naît un dialogue libéré, frappé de sagesse et d’espoir dans la fureur de ces réalités, dérobées aux yeux du commun. De ces vies hors du radar, brisant interdits et paradoxes qui croisent le regard de la cinéaste, se construit une relation de confiance hors et face caméra, induite par le protocole si singulier de la réalisatrice qui invite les langues à se délier, à se raconter comme elles le souhaitent, sans injonction particulière. Zauberman propose quelques questions qui enclenchent le témoignage et, dans sa démarche, aborde les sujets avec une grande innocence, ce qui laisse à ses interlocutrices le pouvoir de briller dans les ténèbres de Tel-Aviv.

Plus que tout, c’est le désir dans toutes ses formes qui enchante La Belle de Gaza: le désir de vivre leur corps, leurs sexualités sans oppression, insufflé par les croisades qu’elles mènent contre la norme, la répression et la marginalité que la société leur impose. Au travers de la diversité aussi multiculturelle que religieuse s’élèvent ces voix qui franchissent les frontières, muant La Belle de Gaza en figure de résistance face à l’ultra-conservatisme, gangrénant ces terres meurtries par l’adversité.


Emilie Fradella

Appréciations

Nom Notes
Emilie Fradella 17
Marvin Ancian 13
Noémie Baume 16